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NOMBRILISME (Avril 1999 - numéro 18)
La 6ème nocturne de Pénombre avait pour thème "Les lycées sous le feu de l'évaluation", elle a eu lieu à Paris au Conservatoire national des Arts et Métiers le 25 mars dernier. Environ quatre-vingt-dix personnes sont venues débattre des usages des "indicateurs de performance", autrement dit des indicateurs de réussite au bac, publiés par le ministère de l'Education nationale et repris par la presse dans le cadre de guides ou de palmarès des lycées. La nocturne était présidée par Jean-René Brunetière, et les intervenants étaient Claude Thélot, ancien directeur de l'évaluation et de la prospective au ministère de l'Education nationale, Antoine Reverchon, journaliste, au Monde et Thierry Saudejaud, proviseur du Lycée Jean-Perrin à Lyon. C. Thélot a raconté avec passion ce merveilleux outil d'évaluation que la DEP a eu les moyens (vertus de la centralisation napoléonienne!) de mettre au point ces dix dernières années. Merveilleux outil, fiable, complexe sans être inutilement compliqué, les IPES devraient servir à nourrir un débat public et alimenter une auto-évaluation et une amélioration des établissements. A. Reverchon, soulignant comme C. Thélot l'énorme demande sociale d'évaluation, a montré l'évolution des publications du Monde, depuis le classement des lycées sur le seul taux de réussite au bac, jusqu'à la publication cette année d'une sorte de guide pour trouver, à travers les différents indicateurs, non plus le "bon" lycée, mais le lycée adapté à chaque type d'élèves. Th. Saudejaud a parlé, des effets de la publication des indicateurs et de leur traduction médiatique dans son lycée, et du travail qu'il a impulsé à partir de ces chiffres mais aussi de l'analyse concrète des atouts et des projets de son établissement. Le débat s'est poursuivi dans la salle, chacun exposant ses positions ou ses doutes par rapport à cette tension entre le souhait de poursuivre une démarche évaluative publique salutaire et une insatisfaction assez marquée quant aux pratiques observables. Les effets évidemment pervers d'un classement en "bons" et "mauvais" lycées ont été dénoncés (tous les intervenants, tout en s'en défendant, ont repris ces termes!), ainsi que le consumérisme scolaire, qui retire aux parents et aux élèves leur rôle d'acteurs du système éducatif (tant sur le plan individuel que collectif). Le danger de "faire du point" d'évaluation a été soulevé (les "bons" hôpitaux sont ceux qui ont de "bons" malades ). Une évaluation ne se concevant bien qu'en rapport avec des objectifs clairement définis, la nécessité d'une politique clairement énoncée de l'Education Nationale, et de pilotages efficaces par des instances compétentes ont été fortement évoquées. Le jeudi suivant (1 avril) chacun se positionnait à sa façon alors que le ministère avait modifié sa politique de diffusion, permettant l'accès gratuit à sa base de données à l'avance sous réserve de signature d'une charte et du respect de la date d'embargo. L'Express avait abandonné le terrain, Le Monde et Le Nouvel Observateur reproduisaient sans grand changement leur formule de l'année précédente en ajoutant des réflexions répondant assez directement aux critiques émises dans le cadre de la nocturne (mais sans y faire référence ), Libération (1 avril) et La Croix (2 avril) traitaient le sujet en évoquant explicitement cette initiative. Seul Le Figaro continuait imperturbablement à donner le classement des lycées selon leur taux brut de réussite au bac selon un système laissant de côté toutes les mises en garde méthodologiques officielles et mettant de fait en avant les résultats des établissements les plus sélectifs.
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