|
||||||||||||||||||||||||
Juillet 2003 numéro 34[Table des matières]
Les hommes et les femmes les plus...
Peut-être que je devrais men réjouir, mais je suis perplexe. « Les femmes ont gagné la guerre des sexes » titre Le Monde à la une, le 23 janvier 2003. Non pas perplexe parce quon ne saurait plus qui est le repos de la guerrière. Pas même, parce que la guerre en question se déroulait, paraît-il, sans que nous ne le sussions, au sein de la police. Mais parce que cette victoire sexprime par des pourcentages. Et, plus fondamentalement, parce que cest sur une base de statistiques que lon a délimité le champ de bataille. Quon en juge ! La victoire, dabord. On savait que lenseignement, la médecine et quelques autres professions sétaient fortement féminisées depuis quelques décennies. Voici que maintenant, cest la police. Réjouissez-vous, mes surs ! « Le pourcentage des femmes parmi les reçus est passé de 30 à 49 % chez les commissaires, de 24 à 38 % chez les lieutenants et de 10 à 32 % chez les gardiens de la paix ». La parité est en marche. Les causes de la victoire, maintenant. Larticle nous apprend dabord que ce succès éclatant est dû à une épreuve physique : elle consiste à effectuer un parcours du combattant. Au passage, je mesbaudis que nous ayons gagné la « guerre » non pas en terrassant nos mâles compagnons à la lutte ou au pistolet, mais en rivalisant sur un pacifique parcours athlétique. Que voilà une guerre sans mort dhommes, ni de femmes du reste, qui pourrait servir dexemple aux belliqueuses tribus qui peuplent notre planète ! Or, pour noter cette épreuve, il y avait deux barèmes différents : par exemple, pour obtenir 15/20, un homme devait faire le parcours en 1 minute et une femme en 1 minute et 27 secondes (le même parcours pour les deux). Donc, la victoire était tout inscrite dans la différence des deux barèmes. Pourquoi est-il équivalent, pour une femme, de faire en 127" ce quun homme fait en 1 minute, plutôt quen 115" ou 140" ? Qui a décidé cela ? Sur quelles bases ? Quoi quil en soit, ce double barème a trop avantagé le « sexe faible ». Lenvolée de la statistique que je reprends ci-dessus est en effet trop forte pour ne pas être suspecte ! La victoire est si écrasante quil est évident quelle résulte dune faveur. Telle est du moins la conclusion qui en a été tirée. Alors, on décide de changer le système. Dorénavant, le barème de temps sera le même pour les deux sexes. Mais, cest le contenu du parcours qui est différencié : là où un homme doit porter un sac de 40 kilos, une femme naura que 25 kilos ; léchelle sous laquelle une femme doit progresser aura moins déchelons que celle des hommes ; etc. Différencier les poids et les longueurs, pour un temps identique serait-il donc moins arbitraire que de différencier les temps pour les mêmes caractéristiques physiques ? Cela nenlève rien semble-t-il au rôle éminent quon fait jouer à la statistique dans laffaire : lécart entre la manière de noter les hommes et celle de noter les femmes sera réputé correct si, au terme de lépreuve, on trouve un pourcentage dhommes et de femmes conforme à ce quil doit être ! Quant à savoir doù sortira cette dernière référence Mais enfin ! Comme disait le Maréchal Foch à son état-major : « messieurs, de quoi sagit-il ? » (aujourdhui, il dirait « mesdames et messieurs »), il sagit de recruter des policiers dont on sassure quils sont le plus possible aptes à accomplir leurs missions. Sil sagit darrêter un voleur, on dirait que le voleur court aussi vite et se débat aussi fort quel que soit le flic qui lui court après, homme ou femme. Sil faut une épreuve physique, ne doit-elle pas sélectionner les plus aptes à la faire ? Et tant pis sil se trouve que ce sont des mecs : moi, ça ne me donne pas détat dâme. Ou alors, la force physique nest pas utile : les nénettes gardent toutes leurs chances et on na pas besoin de lépreuve physique. Mais voilà ! dans nos sociétés numérisées, la justice paraît devoir être statistique. Et, il sagirait dêtre justes dans lattribution des emplois ; non pas dêtre efficaces dans laccomplissement des tâches.
Mélanie Leclair |