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RISQUES CHRONIQUES (Novembre 2000 - numéro 23)
Et pour quelques bières de trop Une dépêche AFP du 28 août nous apprend quun chauffeur-routier belge, surpris en train de zigzaguer sur lautoroute A31 sous lempire dun état alcoolique, a été condamné lundi par le tribunal correctionnel de Metz à huit jours de prison ferme, trois mois avec sursis et cinq ans de mise à lépreuve. Linformation est précise : la somme dont le chauffeur doit sacquitter, 11 500 F, est également exprimée en euros (1 743) et le taux dalcool dans le sang affiche deux décimales : 0,87 g. On nous parle ensuite de laveu du chauffard : 11 bières ingurgitées, dont deux boîtes dans le camion juste avant de prendre la route. Si la sévère peine infligée au routier peut avoir un effet prophylactique, la mise en regard des 0,87 g. et des 11 bières est beaucoup moins heureuse en termes de prévention routière. Cette information est sans doute exacte, pour peu que la corpulence du chauffeur soit respectable (plausible), que les 9 autres bières bues avant de monter dans le camion aient été des demis (25 cl) plutôt que des boîtes (33 ou 50 cl), que la teneur en alcool nait excédé 4,5° (il est rare de consommer des bières light quand on en boit 11 de suite), que le rythme auquel il ait avalé les bières ait été très lent (peu probable) et que le délai entre linterpellation et la prise de sang ait été très long. Même si lensemble de linformation est exacte, il aurait sans doute été plus judicieux de ne livrer quun seul de ces deux chiffres. Il suffit, pour sen persuader, de lire le très court article du France Soir du 29 août, repris ici in extenso : "11 bières et puis sen va. Un chauffeur-routier belge a été condamné hier par le tribunal de Metz à huit jours de prison ferme, et cinq ans de mise à lépreuve pour conduite en état divresse. Il avait été pris en train de zigzaguer sur lautoroute avec 0,87 gramme dalcool dans le sang. Il avait ingurgité 11 bières avant de partir. À lépoque où la limite dalcoolémie était à 0,8g., le repère de 3 verres (bonjour les dégâts aidant à fixer cette barre) était couramment envisagé comme seuil à partir duquel il fallait hésiter à prendre le volant. Avec cet article, le lecteur effectuant une règle de trois est tenté de croire quavec 6 verres, il atteindrait à peine 0,5g. Or on peut imaginer quà lheure actuelle, le seuil raisonnable est perçu nettement inférieur. Lenquête ESPAD de lObservatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT) et de lINSERM nous renseigne sur les représentations de livresse chez les collégiens et les lycéens. Plus de la moitié de ceux qui ont déjà été ivres considèrent quil leur faut moins de six verres pour atteindre cet état, sachant que livresse est censée être un stade dalcoolisation nettement plus élevé que le seuil à partir duquel il est déconseillé de prendre le volant. Est-il opportun de remettre en question ces représentations à lheure ou le dépistage est sur le point de sélargir à lensemble des substances psychoactives ? La précision, elle aussi, peut parfois nuire.
François Beck |