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Chroniques d'avant "séisme"

Juillet 2002- numéro 30 [Table des matières]

 

Oser zéro, c’est osé !

Le top de la promesse électorale tendance 2002 : « zéro ! » Je vous promets… zéro ! Et zéro, ce n’est pas rien, c’est même un chiffre gonflé ! (façon de parler : on gonfle souvent les chiffres en période électorale, mais là, ce qui est gonflé, c’est de dégonfler les chiffres à ce point, évidemment).

Jugez-en :
- « impunité zéro » (plutôt à droite, mais la gauche glose) ;
contre :
- « zéro SDF » (ça c’est de la gauche, mais la droite n’en dira pas moins).

Là il me semble nécessaire de distinguer le zéro dur et le zéro mou. Le vrai zéro, le zéro dur, le zéro vraiment zéro est manifestement trop gonflé, dans son utilisation électorale : on n’imagine pas qu’au jeu du gendarme et du voleur, pour la première fois depuis l’origine du monde (et de la maréchaussée) ce soit toujours le gendarme qui gagne. On n’ose pas croire hélas non plus à l’extinction du paupérisme après 20 heures (selon une proposition électorale célèbre d’une époque où le vocabulaire était différent).

Nous avons donc affaire à une nouvelle race de zéro : le zéro mou, le zéro « façon de parler » qui offre de salutaires perspectives de souplesse aux potaches irrités par le côté rigide de l’arithmétique bornée des profs.

En bon français, ce « zéro » pourrait donc être traduit par « le moins qu’on pourra mais c’est pas de la tarte » ou par « on sait vraiment plus quoi faire mais ça peut plus durer comme ça sinon on va dans le mur », la sémantique évoluant à moyen terme vers « c’est vrai que ça a augmenté, mais moins qu’en Mongolie extérieure au siècle dernier, et c’est parce qu’on a changé la base statistique ».

Je trouve les zéros de cette campagne un peu « usés, vieillis, fatigués… » Pas vous ?

Aube Dussoir