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Lettre d'information de Pénombre

association française régie par la loi du 1er juillet 1901

Mars 2006– numéro 42[Table des matières]

 

CHRONIQUE CITOYENNE


La dictature déomocratique

À la suite du référendum du 29 mai 2005 sur la constitution européenne, j’ai éprouvé comme après chaque consultation démocratique deux chagrins.

Le premier vient de ce qu’en démocratie, où chaque voix a en principe le même poids, il suffit de quelques-unes, voire d’une seule, pour emporter le morceau(1). Je préfèrerais - on peut toujours rêver - une réunion de tous les électeurs où l’on discuterait jusqu’à ce qu’il apparaisse à tous que la solution S est la bonne, et qu’on l’adopte donc, ou que la personne P est la plus qualifiée et qu’on l’élise. Ce procédé par consensus, qui existe dans quelques cases à palabres africaines ou dans quelques cercles restreints chez nous, n’est malheureusement pas transposable en politique, car la discussion prendrait un temps infini et beaucoup de gens ne sont pas prêts à remettre leurs idées en cause.

Dans le même ordre de pensées, quand un vote est acquis avec 55 % des voix, voire avec 53 %, les commentateurs parlent de majorité confortable, alors que cette décision a contre elle une bonne partie des électeurs. Il en a été ainsi quand le PS a voté en interne à 60 % en faveur de la constitution. Cette majorité « nette » montrait un parti divisé. En effet, le jour du vote national ses partisans ont voté à 60% contre.

Ce qui a conduit au commentaire : « Le » PS a basculé. Non ! 20 % ont changé leur fusil d’épaule, la grande majorité, 80 %, a gardé sa position. De même, « la » France n’est pas devenue socialiste en 1981. Il a suffi d’un changement de voix de 5 %, les 95 % restants votant comme d’habitude. Ou encore au référendum, ce n’est pas parce que le oui a obtenu 55 % des voix et le non 45 % que « les » Français ont dit non. Une majorité un peu plus forte que la minorité a dit non. Sans compter que ces nonistes étaient divisés en deux groupes totalement opposés, mais ceci est une autre affaire.

La deuxième chose qui me chagrine, concerne l’interprétation des résultats des élections. On a ainsi entendu dire par certains des partisans du non que ceux qui avaient voté ainsi avaient raison, que cette décision était la bonne, etc… Or, ce n’est pas parce qu’une décision est majoritaire qu’elle est la meilleure ou qu’elle est morale. Ce serait évidemment la même chose si le oui l’avait emporté - qu’on ne me fasse pas de procès d’intention. C’est le respect de la décision majoritaire qui est moral, pas le contenu de la décision. Il y a eu, il y a et il y aura des résultats d’élection catastrophiques. Le peuple, comme l’individu, est faillible.

 

Alfred Dittgen

(1) N.d.l.r. Voir aussi sur cette question l’article de Nicolas Meunier dans le n°33 de la lettre blanche, d’avril 2003 : « En démocratie, la légitimité commence à 1, enfin en principe...