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Encore une médaille ratée de peu, la France fait appel

« POUR L’ATTRAIT des investissements directs étrangers, l’Hexagone est classé au 4e rang des pays industrialisés, après les États-Unis, le Luxembourg et la Chine » (Challenges, 10 juin 2004). Sans même chercher à savoir la méthode employée pour ce classement, on peut se permettre de sursauter à la lecture de ce titre.

Avant tout, il est pour le moins osé de considérer la Chine comme un pays industrialisé, qualificatif traditionnellement réservé aux pays d’Europe de l’Ouest, à ceux de l’Amérique du Nord, ainsi qu’au Japon, à l’Australie et à la Nouvelle Zélande. Il faudrait donc choisir entre une France au quatrième rang mondial ou au troisième rang des pays industrialisés. Allons un peu plus loin : on peut douter, dans le cas précis de la question des investissements directs étrangers, de la légitimité à faire intervenir le Luxembourg dans ce classement. Ce type d’investissements regroupe en effet les achats d’entreprises, par opposition aux investissements dits « de portefeuille » qui consistent en achat d’actions ou d’obligations. La puissance industrielle du Luxembourg a bien décliné avec la fin de la sidérurgie européenne et aujourd’hui, sur les 462 690 habitants du Grand Duché (selon l’estimation de juillet 2004 de la CIA), ceux qui ne profitent pas de la manne communautaire vivent des services financiers (il reste 8 % de la force de travail dans l’industrie et 2 % dans l’agriculture). Sans attenter à l’honneur du plus petit pays de l’Europe des Quinze (mais deuxième dans l’Europe des Vingt-cinq avec l’arrivée de Malte !), il est réaliste d’affirmer que la comparaison n’est pas vraiment valable. Les statistiques internationales sur le sujet ne font d’ailleurs presque jamais apparaître ce pays.

En économie, il n’existe pas de médaille de bronze. Alors, troisième, quatrième, quelle importance ? D’autant plus qu’il est possible que les autres grands pays d’Europe de l’Ouest soient tout proches derrière la France.
Pourquoi ces pinaillages ? Le même article s’étonne du « paradoxe » de la mauvaise image du pays : peut-être faudrait-il éviter d’amener de l’eau au moulin. En titre du même article, « L’Hexagone est le pays qui attire le plus les investisseurs étrangers juste après les États-Unis » n’aurait pas été plus faux, mais bien plus remontant pour le moral.

Nicolas Meunier


Pénombre, Novembre 2004