DANS SON SUPPLEMENT « développement durable » du jeudi 26 mai 2005, Le Monde dresse un état des lieux très intéressant sur les problèmes environnementaux et les solutions trouvées par certains pays pour y remédier. Mais en bas de la page IV, dans un article sur le commerce équitable, il est écrit que « depuis 1989, les États-Unis se sont retirés de l’accord international sur le café, si bien que le cours de ce produit est désormais fixé par les bourses de New York et de Londres, et que les conséquences sont fracassantes : le prix payé au producteur chute de 7 000 % ».
Que signifie une baisse de 7 000 % ? Un prix peut au maximum baisser de 100 %, si le bien devient subitement gratuit. Quant à une baisse supérieure à 100 %, mathématiquement parlant cela signifierait que le prix devient négatif. Voici quelques exemples numériques, pour ceux qui ne seraient pas convaincus. Si le prix de la tonne de café vaut initialement 1 000 euros, une baisse de 10 % donne un prix de 1 000 - 100, soit 900 euros ; une baisse de 70 % donne un prix de 1 000 - 700, soit 300 euros ; et une baisse de 100 % donne un prix de 1 000 - 1 000, soit 0 euro. Passons maintenant à des cas purement théoriques : une baisse de 200 % donnerait un prix de 1 000 - 2 000, soit - 1 000 euros, et une baisse de 7 000 % donnerait un prix de 1 000 - 70 000, soit - 69 000 euros. Autrement dit, si le prix du café baissait de 7 000 % comme le prétend cet article, cela voudrait dire qu’au lieu de vendre sa tonne de café 1 000 euros, le producteur doit payer 69 000 euros pour que quelqu’un veuille bien l’en débarrasser !
De deux choses l’une : soit ce producteur a découvert que son café était radioactif et il est prêt à tout pour le faire traiter à La Hague, soit le journaliste a du mal avec les pourcentages. Je penche, hélas, pour la deuxième hypothèse.
Serge Darriné
Pénombre, Décembre 2005