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La pénombre des âmes

« Je repose à l’ombre des grands hêtres, dont les branches s’abaissent comme accablées par l’air lourd de cette journée ; de temps à autre j’entends non loin d’ici les pas des personnes qui traversent le sentier de la forêt. Je ne vois personne, car, immobile, je plonge mes regards dans l’éther. Un clair rire d’enfant sonne à mes oreilles, mais le silence qui m’environne absorbe tout bruit, et au bout d’une seconde ce rire éteint semble déjà infiniment loin. Je ferme les yeux et j’ai quelques instants plus tard, en les rouvrant, la sensation d’avoir dormi une nuit entière. Dans cette ambiance de silence et de paix je perds pour ainsi dire la notion du moi, et je cesse d’être réellement pour m’incorporer entièrement à la nature. »

Arthur Schnitzler
La pénombre des âmes, Stock, 1994.


Pénombre, Août 1996