Stupéfaite à la cime de l’instant,
La chair se fait verbe – et le verbe se précipite.
Se savoir banni sur terre, étant soi-même terre,
C’est se savoir mortel. Secret archi-connu
Et aussi secret vide, sans rien à l’intérieur.
Les morts n’existent pas, seulement la mort, notre mère.
L’aztèque le savait, le grec le pressentait :
L’eau est feu et pendant le parcours
Nous autres ne sommes que feux de paille.
La mort est la mère des formes…
Le son, bâton aveugle du sens :
J’écris la mort et je vis en elle
Un instant. J’habite ce son :
cube pneumatique transparent,
il vibre sur cette page,
disparaît dans ses échos.
Paysages de mots :
mes yeux les dépeuplent rien qu’à les lire.
Peu importe : mes oreilles les propagent.
Ils ressurgissent là-bas, dans les zones indécises
Du langage, villages lacustres.
Ce sont des créatures amphibies, ce sont des mots.
Ils passent d’un élément à un autre,
Ils se baignent dans le feu, reposent dans l’air.
Ils sont de l’autre côté. Je ne les entends pas :
que disent-ils ?
Ils ne disent rien : ils parlent, parlent.