« 55% des femmes soldats américaines déclarent avoir été victimes d’abus sexuels », tel est le titre d’un article publié par Le Monde du 24 décembre 1996. Le sous-titre apporte quelques précisions sur la nature des faits dont une majorité des 196000 éléments féminins des forces armées américaines se disent victimes : « L’armée est confrontée à une vague continue de témoignages sur les agressions - viols, harcèlements, menaces etc. - dont seraient victimes nombre de recrues féminines aux États-Unis ». Dans le corps de l’article, nous allons en apprendre encore un peu plus sur ces agressions : « abus, allant du viol et de la violence sexuelle au simple « regard » et « geste » déplacés ». Le correspondant du Monde à Washington, Laurent Zecchini, qui s’est pourtant rendu sur le terrain - sans doute avec des lunettes très foncées - a oublié de demander aux autorités quelle était la proportion de femmes victimes d’un viol, d’agressions autres que le viol et de femmes ayant été atteintes, de plein fouet, par un regard déplacé. Le sous-officier de permanence qui l’a reçu était peut-être une femme. On comprend alors que le journaliste n’ait pas insisté, préférant aux questions déplacées, « la sécheresse des chiffres qui montrent l’ampleur du phénomène ».
A partir de chiffres partiels que Le Monde nous fournit, on peut estimer à seulement 13% la proportion des plaintes qui sont suivies d’une enquête. Ce chiffre est intéressant. On imagine difficilement qu’une plainte pour viol ne fasse pas l’objet d’une enquête. Quant à enquêter sur un regard déplacé, cela demande des moyens d’investigation si sophistiqués que même la riche Amérique ne peut se les offrir à l’heure actuelle.
Victor Descombres
Pénombre, mars 1997