L’éditorial du numéro 25 (" Des milliers par myriades ") donne à penser. En France, jusqu’en 1948, la suite million, billion, trillion, etc. s’énumérait selon des intervalles multiplicatifs de 10 puissance 3. Ce n’est qu’à partir de cette date que les Français ont adopté la convention respectée par les Anglo-saxons (Américains et Allemands) avec une progression géométrique de raison 10 puissance 6. Visiblement Alexandre Vialatte a conservé la convention ancienne. Il compte de mille en mille. Du coup, contrairement à ce qu’affirme l’éditorialiste, il a raison (selon cette convention ancienne) lorsqu’il écrit que le quintillion est un million de trillions. En revanche (et toujours par rapport à son propre système de référence) il se trompe lorsqu’il affirme que le quadrillion est un million de trillions. Entre la Lune et la Voie Lactée, finalement, il y a du monde. Ce qui me rend perplexe, c’est un petit bout de phrase, un peu plus loin :
" ... cette chronique a dû être écrite avant-guerre... ". D’abord c’est facile à vérifier. Julliard, l’éditeur du volume cité, précise que la chronique a été publiée le 5 novembre 1957. Le recueil chronologique des Chroniques de la Montagne récemment publié chez Robert Laffont le confirme. Quand on sait qu’à cette époque Vialatte donnait une chronique hebdomadaire au quotidien auvergnat et qu’il confiait sa copie au chef de train du Paris-Clermont-Ferrand (c’était avant le fax et l’e-mail !), on peut raisonnablement supposer que la chronique a été rédigée fin octobre-début novembre 1957. Donc avant-guerre. Ben oui ou ben non. Avant la guerre du Vietnam (je parle de celle des Américains), mais après la guerre de Corée. Avant la guerre du Golfe mais après la guerre de 1870. En tout cas après la Seconde Guerre mondiale (c’est sans doute de celle-là que veut parler l’éditorialiste) et même après 1948. Il était comme ça, Vialatte. P.S. Bravo pour votre publication. Elle est passionnante et devrait être lue (et même apprise par cœur) par les représentants de nombreuses corporations : journalistes, hommes politiques, employés des services publics, etc. Je viens de vous adresser mon bulletin d’adhésion et espère pouvoir vous lire longtemps. Cordialement.
Hervé Garrault
Abonnée depuis deux ans sinon trois à votre très remarquable revue, je suis au (vraiment sincère !) regret de vous informer que je baisse les " bras de ma pauvre cervelle " de quatre-vingt-trois ans devant son niveau qui décidément vole trop haut pour eux. J’ai toujours apprécié et apprécie encore votre style littéraire plein d’humour très particulier que vous transposez à merveille dans la langue de Shakespeare !
Mais dès que les chiffres prenaient le dessus pour charpenter une démonstration, je perdais pied, de même que dans les méandres de ce qui me paraissait ressembler à une guerre pichrocoline entre des tenants de deux tendances ou écoles psychiatriques rivales.
Alors, pour ménager les neurones qui me restent, j’ai décidé de ne plus les exposer à de trop rudes exercices, et vous prie de bien vouloir excuser mon retrait de votre compagnie trop savante pour moi, ce qui n’enlève bien entendu rien à la respectueuse estime que je vous porte !
Blanche de Montmolin Heusch
Pénombre, Janvier 2002