Les dépenses des caisses d’assurance maladie/accidents du travail sont passées de 7,6 % du PIB en 1996 à 8,3 % du PIB en 2002 (92,4 milliards d’euros en 1996 à 125,9 milliards d’euros en 2002 selon la Commission des comptes de la Sécurité sociale). Les dépenses de santé ont donc dérapé entre 1996 et 2002, elles ont gagné 0,7 point de PIB en 6 ans ! Peut-être pas de façon aussi catastrophique qu’on le prétend, mais elles ont dérapé, et, si cette évolution devait se poursuivre, elle pourrait à terme mettre en péril l’avenir de notre système d’assurance maladie.
En revanche, selon l’OCDE, les dépenses de santé, qui représentaient en 1995 9,5 % du PIB, s’élevaient, toujours en 2001, à … 9,5 % du PIB (elle n’a pas encore publié les chiffres pour 2002). Les dépenses de santé sont donc restées stables en 6 ans ! (nous sommes bien loin des 13,9 % du PIB des USA !). Comment expliquer ce paradoxe : dépenses stables pour l’OCDE, dérapant pour la CCSS ?
Année | 1996 | 1997 | 1998 | 1999 | 2000 | 2001 | 2002 |
PIB (Insee) | 1 212,2 | 1 251,2 | 1 305,9 | 1 355,1 | 1 420,1 | 1 475,6 | 1 520,8 |
Dépenses d’assurance maladie/AT (CCSS) en milliards d’€ | 92,414 | 94,077 | 97,185 | 105,620 | 111,322 | 119,497 | 125,928 |
Dépenses en % PIB (CCSS) | 7,6% | 7,5% | 7,4% | 7,8% | 7,8% | 8,1% | 8,3% |
% du PIB en dépenses de santé (OCDE) | 9,5% | 9,4% | 9,3% | 9,3% | 9,3% | 9,5% | |
Dépenses santé = PIB x % (OCDE) | 115,2 | 117,6 | 121,4 | 126,0 | 132,1 | 140,2 | |
Taux de remboursement | 80,3% | 80,0% | 80,0% | 83,8% | 84,3% | 85,2% |
Tout simplement par le fait qu’il ne s’agit pas de la même chose ! Les dépenses d’assurance maladie/AT représentent un pourcentage variable des dépenses de santé. On pourrait donc conclure hâtivement que le taux moyen de remboursement des dépenses de santé a augmenté en France entre 1996 et 2002.
Or, il n’en est rien, au contraire ! Chacun a pu le constater. Dans le meilleur des cas, les taux de remboursement des dépenses de soins sont restés stables. Si les taux de remboursement sont stables et les dépenses aussi, les dépenses d’assurances maladie/AT ne peuvent qu’être stables également.
Il y a donc une erreur quelque part ! Pas obligatoirement ! Comment cela ? Tout simplement parce que les soins remboursés durant une période ne sont pas obligatoirement ceux engagés durant une période équivalente.
Prenons pour hypothèse que les soins ont toujours été remboursés au taux de 1996 (80,3%), et que seuls ont varié les délais de remboursement. Dans ce cas les variations de délai de traitement des dossiers nécessaires pour expliquer la différence d’évolution entre dépenses de santé et d’assurance maladie/AT seraient les suivants1.
Année | 1996 | 1997 | 1998 | 1999 | 2000 | 2001 |
Variation en jours | - | -1 | -1 | +16 | +18 | +23 |
L’apparente contradiction entre les données de l’OCDE et celles de la CCSS peut donc s’expliquer par le rattrapage d’un retard de 23 jours dans le traitement des dossiers de remboursement (un peu plus si les taux de remboursement ont diminué).
Il est à noter que la carte Vitale a été mise en place, progressivement, à partir de 1999. C’est également en 1999 qu’apparaît le début d’un rattrapage du décalage entre dépenses et remboursements.
On peut donc se demander si le “ dérapage des dépenses de santé ” n’est pas, en fait, la conséquence du bon fonctionnement du système Sesam Vitale ?
Jean Goffredo
1. [(tx de remboursement ‘année a’ - tx de remboursement 1996) / tx de remboursement 1996] * 365
Pénombre, Août 2004