Dans le Figaro du 19 octobre 2000, dans le Bloc-Notes de Max Clos, intitulé ce jour-là “Qui brûle les synagogues ?” je relève le paragraphe suivant :
“Un désert statistique
Combien y a-t-il de Maghrébins en France ? Combien de musulmans ? La vérité oblige à reconnaître que nous n’en savons rien.
Les sociologues et les démographes ne peuvent avancer que des estimations et leurs chiffres varient énormément de trois à six millions, en ce qui concerne les Maghrébins. Certains pensent que cette population doublera tous les 20 ans et atteindra les 50 millions en 2060. D’autres, pour diverses raisons, jugent cette hypothèse invraisemblable…”
Notons d’abord que Maghrébins et musulmans ne sont pas synonymes, les Turcs et une proportion notable des Africains de France sont également musulmans. Par ailleurs, si l’islam se transmet facilement d’une génération à l’autre, en est-il de même de la maghrébanité ? Parmi les descendants des Italiens catholiques arrivés en France au début du siècle, il y a sûrement toujours beaucoup de catholiques, mais sûrement très peu d’Italiens. Pourquoi en irait-il autrement des Maghrébins ?
Faisons néanmoins l’hypothèse stupide que les descendants des Maghrébins installés en France restent maghrébins. S’ils doublent tous les 20 ans, pour arriver à être 50 millions en l’an 2060, cela signifie qu’ils seraient 25 millions en 2040, 12 millions et demi en 2020 et plus de 6 millions aujourd’hui. Ce nombre dépasse celui, vraisemblable, de l’ensemble des musulmans aujourd’hui (cf. Pénombre, Chiffres en folie, n° 15, France-Line Mary, La religion du nombre et Alfred Dittgen, Commentaires). Quant au doublement de cette population, qui suppose un taux d’accroissement de 3,5 % par an, à moins d’admettre un déferlement en provenance d’Afrique du Nord, on ne voit pas comment il pourrait se produire. Il nécessiterait une fécondité de 7 à 8 enfants par femme. Cette fécondité a existé au Maghreb il y a une trentaine d’années, mais, depuis, elle a été divisée par 3, et encore plus dans les populations en France originaires de cette région.
Il est normal que quand on essaie de chiffrer une réalité difficilement mesurable on donne une fourchette entre deux valeurs vraisemblables, mais il est stupide ou criminel de donner une fourchette entre une valeur vraisemblable et une absurdité.
Alfred Dittgen
Pénombre, Janvier 2001