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Pulp fiction

Pulp fiction

(littérature de gare en français)
Comme celle qui figure avec cet article, les illustrations de ce numéro de la Lettre blanche proviennent de magazines pulp des années 1930 et 1940.

(littérature de gare en français)
Comme celle qui figure avec cet article, les illustrations de ce numéro de la Lettre blanche proviennent de magazines
pulp des années 1930 et 1940.

 

PASSAGE AU RAYON Jus de fruits du supermarché. Je cherche, pour le petit déjeuner du lendemain, une brique de pur jus d’orange en marque distributeur, autour de 1,50 € le litre. Le rayon est vaste et offre un grand choix de produits classés par famille et par marque, sans que les purs jus et les jus à base de concentré soient séparés tandis que les nectars sont disposés sur les étagères basses. Ce qui me conduit à passer rapidement le rayon en revue pour trouver la brique souhaitée.

Mon regard s’arrête sur une brique plus grande que les autres (1,5 litre), à l’étiquette peu originale, illustrée de quartiers d’orange, mais avec une mention que je n’avais jamais observée jusque là :

 

100 % PUR JUS Orange

(avec 2 % de pulpe)

Me voici pris de doute. C’est quoi, ce « 2 % de pulpe » ? Beaucoup ? Très beaucoup ? Pas beaucoup ? L’observation des autres produits ne m’aide pas : la plupart ne mentionnent que le réglementaire « 100 % pur jus » ou « 100 % pur jus pressé », mais quelques uns se différencient par une mention complémentaire : « orange pulpée », « avec pulpe », « très pulpé » ou « fortement pulpé », ou, à l’opposé, « sans pulpe » ! Mais sans aucune indication d’un taux de pulpe, sinon dans la liste des ingrédients pour certains, avec 2 % pour un jus courant, 3 % à 5 % pour un jus avec pulpe, 6 % pour un jus fortement pulpé…

Les nectars eux sont constitués à plus de 50 % de jus et de pulpe de fruit et leur taux de pulpe est mentionné, par exemple : « 55 % de jus d’orange dont 5 % de pulpe », soit 9 % de pulpe dans le jus ou le concentré auquel on ajoute ensuite de l’eau et du sucre ainsi que de la vitamine C, de l’acide citrique (E330) et de la gomme de guar (E412).

Curieusement, alors que des fibres sont normalement présentes dans la pulpe, certains jus pulpés affichent : « fibres : 0 » et un jus sans pulpe : « fibres : 0,7 g ». Un jus sans pulpe et sans fibres de marque nationale présentant même un dépôt de plus d’un centimètre au fond du flacon en PET !

En fabrication, la pulpe est généralement séparée du jus extrait au pressage par un procédé d’ultrafiltration et pasteurisée, le jus clarifié contenant les arômes est ensuite recombiné avec la pulpe pour produire le jus de fruit avec le taux de pulpe souhaité. Le reste de la pulpe n’est évidemment pas jeté mais entre dans la formulation des nectars ou des boissons aux fruits.

Ceci permet de répondre au goût des consommateurs : les enfants notamment préfèrent les jus à faible viscosité, donc à faible taux de pulpe, les adultes apprécient davantage un jus pulpé, plus proche du jus obtenu à la maison.

Les fabricants peuvent ainsi ajuster le taux de pulpe, la réglementation ne prévoyant ni minimum ni maximum. En revanche, la pulpe et les cellules ajoutées au jus de façon que les quantités totales dépassent celles présentes normalement dans le jus doivent être déclarées dans la liste des ingrédients. D’où les 5 % ou 6 % qui figurent sur certains jus fortement pulpés, bien que le taux de pulpe de certaines variétés d’oranges puisse atteindre 12 % !

Il n’y a donc pas de taux de pulpe de référence, pour le jus d’orange, certains fruits étant plus pulpés que d’autres. Dans l’absolu, « sans pulpe » ne signifie pas l’absence de toute trace de pulpe ; « avec pulpe » suggère que le jus contient un taux « normal » de pulpe ; « fortement pulpé » laisse entendre que de la pulpe a été ajoutée au jus initial.

Mais alors, ce 2 % de pulpe qui figure sur la face avant de la brique de jus d’orange ? C’est finalement moins que les jus qui se revendiquent pulpés (taux de 3 % ou plus) et plus que les jus sans pulpe. Rien d’autre. Autrement dit, ici, la précision n’apporte pas d’information utile au consommateur qui, en revanche, décodera mieux une mention qualitative : sans pulpe, avec pulpe, fortement pulpé… pour orienter son choix.

Et qu’en est-il du pamplemousse rose, sévèrement pulpé ?

Daniel Cote-Colisson