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Hors série, Mars 1997
Si l'immigration nous était comptée quatrième nocturne de Pénombre, Sénat,
22 octobre 1996
"Troisième article définitif
pour la paix perpétuelle. Il s'agit dans cet article, comme dans les précédents, du droit, non de la philantropie. Hospitalité signifie donc uniquement le droit qu'a chaque étranger de ne pas être traité en ennemi dans le pays où il arrive. On peut refuser de le recevoir, si on le peut sans compromettre son existence; mais on n'ose pas agir hostilement contre lui, tant qu'il n'offense personne. Il n'est pas question du droit d'être reçu et admis dans la maison d'un particulier; cet usage bienfaisant demande des conventions particulières. On parle du droit qu'ont tous les hommes de demander aux étrangers d'entrer dans leur société, droit fondé sur celui de la possession commune de la surface de la terre, dont la forme sphérique les oblige à se supporter les uns à côté des autres, parce qu'ils ne sauraient s'y disperser à l'infini et qu'originairement l'un n'a pas plus de droit que l'autre à une contrée." Emmanuel Kant,
La séance est ouverte à 18 heures 50. Pierre Tournier: C'est un grand plaisir de reconnaître parmi vous beaucoup de regards familiers, preuve que Pénombre devient un lieu où l'on se retrouve, où l'on se reconnaît, où l'on est un peu chez soi... Même ici, surtout ici, dans cette institution de la République, de la démocratie, symbole de la Nation. Mais j'ai un plaisir égal à découvrir des visages qui me sont étrangers, preuve que Pénombre est ouvert sur l'inconnu. Cet inconnu qui peut y venir en passant, parce "qu'il y avait de la lumière", ou s'y installer plus durablement parce que l'éclairage lui plaît. Parmi ces amis inconnus, si bien chantés par Jules Supervielle, je voudrais saluer deux personnes en particulier. Tout d'abord, M. Michel Dreyfus-Schmidt, vice-président du Sénat, qui a bien voulu apporter son haut patronnage et sa présence à cette IVe nocturne de Pénombre. La seconde est née à Yezd en Iran. Je ne l'ai rencontrée que dans ses livres, et quels livres, c'est Stella Baruck. Ceux qui ne connaissent pas encore ses travaux et en particulier son superbe Dictionnaire de mathématiques élémentaires paru en 1992 au Seuil, ont encore quelques mois avant la prochaine nocturne que Stella Baruck nous fera l'amitié d'animer. Quelques précisions sur le déroulement de cette rencontre. Pour ce type de réunion, la Questure du Sénat impose qu'on en finisse à 20h00. Nous avons obtenu une dérogation tout à fait exceptionnelle pour aller jusqu'à 21h00, mais pas au-delà. Nous souhaitions terminer, comme d'habitude par une collation. Pour des raisons logistiques, la chose n'a pas été possible ici. Nous avons prévu de recevoir uniquement les personnes qui figurent sur notre programme, en signe de remerciement, ainsi que nos prochains conférenciers. Appréciez la transparence de Pénombre: on vous dit ce qui se passe dans les cuisines, même quand on ne peut pas vous inviter. Mais on vous promet de faire mieux la prochaine fois. Comme nous sommes dans les cuisines, restons-y un moment. Je tenais à préciser, car la question m'a été posée il y a quelques jours, qu'aucune collaboration aux activités de Pénombre n'est rémunérée. Malgré cela, cette nocturne nous revient à près de 6'000 F, le quart de nos ressources annuelles. Celles-ci sont uniquement constituées des cotisations de nos membres (150 F); nous avons aussi une vingtaine de donateurs privés (les dons allant de 50 à 500 F). Maintenant vous savez tout et c'est très bien ainsi. Certains de mes collègues voulaient à tout prix que je dise, à ce moment-là de mon propos, que des bulletins d'adhésion vous attendaient au fond de la salle. Mais j'ai pensé que ce n'était pas très élégant, et que vous les verriez bien sûr en sortant, aussi j'ai refusé catégoriquement de leur donner satisfaction. Dans un instant Anicet Le Pors introduira cette soirée. Nous laisserons le soin à Philippe Bernard d'animer les débats. Je lui fais toute confiance et le remercie. Je ne devrais donc pas intervenir, sauf si j'avais la surprise de constater que l'on s'éloigne par trop des objectifs de notre association et surtout de l'esprit pénombresque, style ineffable si j'ose dire, mais identifiable à l'il nu. Mes amis administrateurs m'ont donc attribué un rôle de "juge de ligne". Vous savez que dans ces lieux il est facile de faire appel à la force publique si cela s'avérait nécessaire. Au signal, la garde du Palais ferait son office. Vos propos seront enregistrés, non pas pour faciliter les poursuites judiciaires, mais pour rendre possible leur publication. Bien entendu, votre accord sera sollicité avant toute utilisation de vos propos. Sauf exception, dans le cadre de Pénombre nous nous exprimons à titre personnel et non pas ès qualités. Ce n'est pas une figure de style et je voudrais que nos collègues journalistes tiennent le plus grand compte de cette remarque en rédigeant leurs éventuels papiers. A la liste du programme on doit ajouter le nom du Commissaire William Marion, adjoint au responsable du département "études et recherches" de l'Institut des Hautes Etudes de la Sécurité Intérieure (IHESI). Je voulais aussi vous présenter les excuses de Mmes Myriam Ezratty et Marie-Thérèse Join-Lambert et de Mrs Jean-Michel Belorgey, Alain Bihr, Jean-Pierre Delalande, Alain Desrosières, Jean-Paul Grémy, Henri Nallet, Gérard Moreau, Gérard Noiriel et Roland Pfefferkorn. Il y a une tradition, au début des réunions de Pénombre, c'est d'excuser aussi Clara Halbschatten. Clara est une collaboratrice régulière de la lettre blanche, une figure mythique de notre association qu'aucun d'entre nous, semble-t-il, n'a véritablement rencontrée. Certains prétendent le contraire, mais ce n'est pas le lieu pour en débattre car les échanges pourraient être sanglants. D'après la rumeur publique, notre amie, professeur de mathématiques en retraite, qui vient de fêter ses 90 ans, séjourne actuellement à Hiva Oa dans les Îles Marquises. Elle cherche à racheter la dernière demeure de Jacques Brel qui tombe en ruine. Nous l'excusons bien volontiers de son absence ce soir... rue de Vaugirard. Vous avez lu dans le programme ces mots "que compter et au nom de quelles valeurs". A ce propos je voudrais citer une phrase publiée dans Le Figaro: "L'effort des civilisations est justement d'effacer ce besoin sauvage de se jeter sur son semblable quand il n'est pas tout à fait semblable". Le journal est daté du 15 mai 1896. Vous avez sans doute reconnu l'auteur de cette belle pige, le grand Zola. La citation est reproduite dans un petit livre aux belles couleurs; le voici, il est bleu blanc rouge: Le petit dictionnaire pour lutter contre l'extrême droite de Martine Aubry et Olivier Duhamel. Il aurait pu être écrit par des démocrates appartenant à une autre tendance politique, peu nous importe. C'est un livre à lire et à offrir... à offrir à nos enfants, à nos cousins, à nos voisins, aux cousins de nos voisins, aux enfants des cousins de nos voisins, aux voisins des enfants de nos cousins, enfin vous m'avez compris, à tous nos dissemblables en humanité. Monsieur le ministre, nous vous remercions d'avoir, sans hésiter, répondu à notre invitation. Mais je n'en dis pas plus et je laisse la parole à Philippe Bernard, qui lui aussi n'a pas hésité à venir et... comme on dit au cinéma: Pénombre IV action! Philippe Bernard: Bonsoir. Mon rôle pour l'instant se limite à céder la place à Anicet Le Pors qui va ouvrir les débats par un propos introductif relativement long par rapport à ceux que nous attendons des autres participants, avec le sujet qu'il s'est imposé à lui-même "si l'immigration nous était comptée". Dans ce débat, je me situe à la charnière de la discussion. Je ne suis pas compteur, au sens de l'EDF; je ne compte pas les immigrés, mais il m'arrive d'avoir sacrément besoin de statistique sur l'immigration. Je fais partie, je crois qu'Anicet Le Pors le dira, des gens qui disent des choses sur l'immigration, mais qui doivent les dire d'une manière simple, pas forcément d'une manière statistiquement très exacte, à l'opposé des compteurs, des professionnels de la statistique, qui eux, se doivent de dire des vérités tout à fait exactes, mais pas toujours dans un langage très compréhensible. Voici le débat que l'on voudrait ouvrir ce soir avec la quinzaine de personnes qui ont accepté d'y participer avec trois d'entre elles qui vont l'introduire.. Je laisse d'abord la parole à Anicet Le Pors. Anicet Le Pors: Mesdames, Messieurs, je suis impressionné de reconnaître dans l'assistance des personnes extrêmement compétentes et un peu effrayé de penser qu'il y en a d'autres que je ne connais pas... cela fait beaucoup. J'imagine que c'est parce que je ne suis spécialiste de rien que l'on m'a demandé de parler de tout. Comme cela arrive souvent, je le ferai donc d'une manière inévitablement superficielle, mais en comptant sur plusieurs personnes ici présentes, et dont je sais qu'elles ont beaucoup de choses intéressantes à dire. Peut-être qu'au début, je crois qu'il est utile de prendre un certain recul. "Si l'immigration m'était comptée"... Vouloir d'entrée réduire des millions de destinées individuelles, d'aventures quelquefois fécondes, mais parfois aussi extrêmement douloureuses, à un dénombrement, a quelque chose d'incongru, voire à la limite, d'indécent. Nous imaginons mal, sans doute, à quel conditionnement nous sommes soumis lorsque nous avançons une proposition comme celle-là; je crois qu'il n'est pas inutile de rappeler Kant et son "Traité de paix perpétuelle", en 1795, lorsqu'il posait le principe de la mobilité pour tous les êtres humains sur l'ensemble de la planète. Il est certain que si nous étions dans une situation comme celle-là, nous ne nous poserions pas la question de cette façon, nous aurions une autre idée de l'origine et de la destination; nous aurions une vision d'ensemble, alors qu'aujourd'hui nous sommes focalisés sur "chez nous". "Chez nous", c'est-à-dire les Etats-nations qui se sont constitués - nous appartenons à la sphère d'influence de l'un d'eux - et nous sommes dans une région du monde caractérisée par sa richesse. La vision de Kant n'existe pas dans la réalité d'aujourd'hui. Il y a des points dont on est chassé et d'autres vers lesquels on est poussé; c'est aussi le fait qu'il y a des communautés ethno-historiques, comme disent les historiens, les Etats-nations, qui ont créé des barrières ayant comme premier effet, au regard du sujet qui nous intéresse, de révéler des flux et d'inviter à les compter. La Nation est donc une communauté parmi d'autres qui invite à cet enregistrement. Elle est le lieu de l'apprentissage de masse de l'altérité et elle invite donc au dénombrement. Partant de là, ces flux d'étrangers deviennent objet de connaissance. Or de même que dans l'immigration en général, le phénomène est appréhendé comme un phénomène scientifique, mais qu'il est très individuellement vécu, de même celui qui compte, même lorsqu'il prétend faire uvre purement scientifique, ne peut se départir que très difficilement d'une certaine affectivité dans le dénombrement. Je ne connais pas de statisticiens qui aient eu un regard complètement froid vis-à-vis des phénomènes migratoires, même lorsqu'ils en font une présentation qui se veut extrêmement dépouillée. Et je pense également que, le voudrait-il, le compteur ne pourrait pas échapper à un engagement personnel. Par ailleurs, s'il sort de son bureau, il rencontrera d'autres partenaires sur le même terrain: le politique, le polémiste. Et se révélera aussitôt à lui son extrême faiblesse face à des concurrents aussi redoutables. Il se rendra compte, par exemple, ce que beaucoup ont éprouvé ici sans doute, qu'il ne faut que quelques secondes pour convaincre des millions de gens, que les étrangers volent le travail des Français; mais il faudra plusieurs minutes voire plusieurs heures pour démontrer que c'est faux. Il devra donc nécessairement se situer dans cette problématique. Alors pour rendre compte de cette aventure qui est à la fois celle des étrangers, des immigrés, et des chercheurs, des statisticiens, j'ai choisi d'évoquer quelques questions autour de thèmes extrêmement simplifiés. D'abord, pourquoi compter? Ensuite, que doit-on compter? Puis, pour expliquer quoi? Egalement, qui doit compter? Et enfin, en rapport avec quelles valeurs? Avec quelle politique? Pour quelle utilité? Pourquoi compter? Remarquons tout d'abord que, quelquefois, nous refusons de compter. En France, nous n'avons pas voulu établir un registre des étrangers, ce qui aurait permis la comptabilisation immédiate, surtout à l'heure de l'informatique. Nous ne voulons pas non plus fixer des quotas a priori. Si nous avons en tête quelque chose que l'on appelle "seuil de tolérance", nous répugnons à l'exprimer et lorsque cela est fait, c'est sanctionné. Nous parlons souvent des clandestins, nous savons que nous ne pourrons jamais les compter, par définition, mais leur nombre virtuel hante les esprits. Et puis, il y a de bonnes raisons de ne pas compter, lorsque le compte met en cause les droits individuels, la liberté de la personne. La CNIL, à sa manière, y veille. Donc, je crois qu'il est bon de savoir que dès le début nous nous imposons des limites, au comptage. Mais nous sommes obligés de compter néanmoins, pour une raison immédiate: c'est que de toute manière, d'autres comptent si nous ne le faisons pas. Massenet, Mottin, Millioz sont des noms qui évoquent 7 millions, 8 millions, 10 millions d'immigrés ou d'étrangers. Ils le font avec les raisons qui sont les leurs. Mais ils le font en rapport avec des problèmes sociaux réels: l'emploi, la protection sociale, la sécurité... Et partant de là, inévitablement, nous nous acheminons vers un comptage qui, au regard des problèmes qui sont posés à la société française, doit se faire dans des catégories aussi significatives que possible et à l'aide de références et d'instruments connus qui expriment le phénomène que l'on veut appréhender. C'est ainsi que, en ce qui concerne l'emploi, nous serons amenés à comparer des catégories socio-professionnelles. S'agissant de la protection sociale nous évoquerons des structures familiales. Pour comparer des états sanitaires nous parlerons de taux de morbidité, etc. Mais nous rencontrons vite des limites dans la signification de ces catégories. On sait bien qu'il ne suffit pas de dire que depuis vingt ans les immigrés ne représentent que 7,5% de la population française, il y a une autre réalité qui est une réplique immédiate au chiffre: la France se colore. Cette réalité de la coloration de la France a au moins autant de force que le 7,5%. Le quantitatif et le qualitatif entrent là en confrontation, et en confrontations quelquefois, on le sait, violentes. Donc il y a une limite à la signification qui appelle interprétation, finalisation. Mais on peut vouloir compter aussi, pour mesurer l'effet d'une politique, voire même pour la formaliser. C'est ainsi, par exemple, que l'on a souligné, lorsqu'en 1990, ont été attribués de nouveaux moyens à l'OFPRA, que ses performances avaient été aussitôt développées; ce qui lui a permis d'indiquer que, ayant traité plus de cas, il pouvait à la fois faire état d'un taux de refus plus important, mais aussi d'un nombre d'admis au droit d'asile, également plus important. Lorsque les gouvernements utilisent des moyens d'expulsion, on dénombre le nombre de charters, et lorsqu'il y a des événements comme l'affaire des sans-papiers de Saint-Bernard, on compte ensuite, de quelles catégories ils relèvent par rapport aux critères des médiateurs. Mais en même temps, ex-post, on évalue combien étaient alors, selon les appréciations gouvernementales, en infraction, et combien finalement, ont été renvoyés. Le chiffre, est donc partout, se veut signifiant d'attitudes, de comportements, de politiques. Et puis la législation elle-même, impose de compter des choses qu'on ne comptait pas antérieurement. Le fait qu'il faille aujourd'hui une déclaration de volonté des jeunes étrangers nés en France pour accéder à la nationalité française, invite, alors que cela n'était pas nécessaire auparavant, à faire ce compte, mais à prendre en même temps toutes les précautions, car on sait que s'étalant sur plusieurs années, ce chiffre n'a pas, au stade actuel, de véritable signification. Donc, il faut compter. Mais que compter? Si l'on compte beaucoup, on court le risque du fétichisme du chiffre, de lui faire outrepasser la signification que l'on veut lui donner. Si je dis 100'000, 25'000, 30'000, 20'000, 10'000, moins 40'000, beaucoup d'entre vous auront compris, que je viens ici, d'exprimer les ordres de grandeurs des flux annuels d'étrangers enregistrés en France. Au total 100'000, dont 25'000 au titre du travail, puis les autres catégories, au titre du regroupement familial, du regroupement des conjoints, du droit d'asile. Et puis, ce chiffre de 40'000 - dont on n'est pas sûr du tout -, mais qui serait celui des retours, néanmoins importants. On associe à ces chiffres bruts un certain nombre de ratios que l'on veut signifiants, qui le sont effectivement, et qui caractérisent le paysage du dénombrement. Pour dire par exemple, que 1/5 des 3,6 millions d'étrangers est né en France, qu'un Français sur cinq a été étranger ou a eu un parent ou un grand-parent étranger. Qu'un tiers des 4,1 millions d'immigrés est de nationalité française. Ratios qui sont relativement peu connus, mais qui ont une énorme signification dans le débat de société, en infirmant, par exemple, le thème de l'"immigration zéro". Et je crois que c'est un grand progrès que d'avoir traité de ces données en ayant, plus que par le passé sans doute, fait preuve de rigueur quant à la définition de ces catégories. Aujourd'hui, je crois que, grâce notamment à des journalistes comme Philippe Bernard, on fait mieux la différence entre un immigré et un étranger; on sait comment caractériser l'immigrant, mais on a quelques difficultés à le situer par rapport au visiteur dans les conditions concrètes d'aujourd'hui. Néanmoins je pense que l'on peut dire qu'il y a eu des progrès. Ces progrès vont au delà de cette simple catégorisation. On commence à savoir ce qu'est un "effet de structure". On sait que, en matière de scolarité, si l'on tient compte de tous les éléments caractéristiques, des conditions de vie, de travail, des populations considérées, il n'y reste plus rien à expliquer par l'ethnie ou la nationalité. En revanche, on sait qu'à l'embauche, un maghrébin a un taux de refus qui, lui, correspond bien effectivement à ses caractéristiques ethniques, puisqu'il a deux fois plus de difficultés à trouver un emploi. Entre les deux, si on examine la population délinquante, on peut d'entrée, dire qu'il y a cinq fois plus d'étrangers incarcérés que de Français; mais si on enlève les peines qui se rattachent au droit de séjour que, par définition, seuls les étrangers peuvent connaître, on tombe à trois pour un; et si on poursuivait en prenant les autres paramètres caractéristiques de l'effet de structure, on arriverait sans doute à réduire le rapport, sans probablement le réduire à un. Avec cet effet de structure, il y a un effet plus mystérieux: l'"effet de processus" qui a quelque mal à accéder à la compréhension générale. Car les gens pensent qu'en comparant à intervalle régulier des populations définies une fois pour toutes, on peut suivre les évolutions d'une population identifiée. On oublie simplement que ce ne sont pas les mêmes populations que l'on compare et que si cela peut avoir un intérêt, on ne décrit pas la manière dont se déroule le phénomène que l'on veut appréhender, l'intégration, certains d'entre vous diront l'assimilation. C'est comme si l'on comparait des photos à intervalle régulier: on ne rend pas compte ainsi de l'évolution d'une communauté déterminée à un moment donné. On voit bien que l'on est amené à prendre en compte des effets multiplicateurs et des effets secondaires qui parasitent les données primaires, mais qui en même temps enrichissent la compréhension qu'on peut avoir des phénomènes que l'on cherche à appréhender à travers ces comptes. Je crois qu'il n'est pas sans intérêt de rattacher cette problématique de ce que Madame le professeur Delmas-Marty appelle les "logiques floues", qui permettent à des systèmes incertains dans leur signification, de se raccorder les uns les autres. Il y a encore ce que l'on pourrait appeler des effets de "cumul" ou "d'amalgame". Il est vrai que pour beaucoup de gens, étrangers, immigrés, jeunes et délinquants, tout cela ne fait qu'une catégorie et ils n'ont qu'un souci très limité de les distinguer. Cet effet de cumul est une réalité sociale que l'on est obligé de prendre en compte. Et puis, enfin, on sait aussi que, lorsqu'il y a, dans un quartier une présence étrangère nombreuse, les sociologues ont mis en évidence que ce n'est pas lorsque le contact est direct avec l'étranger qu'il y a le plus grand nombre d'électeurs du Front national, mais c'est plutôt à la périphérie, là où l'on appréhende l'autre; ce qu'on appelle l'effet de "halo". Effet de halo, effet d'amalgame, de cumul, de processus, de structure, voilà toute une série d'approches différentes qui s'efforcent de cerner une réalité dont on n'aura jamais sans doute atteint la vérité profonde, mais qui, chemin faisant, grâce à l'action conjointe des chercheurs et des diffuseurs, permettent à la société d'avoir une meilleure connaissance d'elle même. Que veut-on expliquer finalement? Car il ne suffit pas d'identifier aussi bien que possible, avec tous les effets que je viens d'indiquer, telle ou telle catégorie, il faut mettre les catégories en rapport entre elles, il faut faire des modèles. Cette modélisation, il est vrai, trouve rapidement ses limites. Que l'on me permette simplement d'évoquer l'expérience que j'avais faite en 1975, à l'occasion du rapport interministériel sur "l'immigration et le développement économique et social", où nous avions précisément, en modélisant à l'extrême, à la fois tiré l'intérêt de cette démarche et pu en repérer les limites. C'est à cette occasion, par exemple, que nous avons pu montrer, en utilisant le modèle physico-financier qui était utilisé à l'époque au Plan et à l'INSEE, que le renvoi de travailleurs immigrés qui créait, dans un premier temps, à due concurrence, autant d'emplois qu'il en était soustrait, se trouvait compensé, d'une part, par le fait que les immigrés partant, les salaires augmentaient, la compétitivité diminuait, la demande extérieure diminuait aussi, la pénétration extérieure augmentait, le chômage au titre de cet effet secondaire augmentait. D'autre part, le départ des travailleurs immigrés rompait, dans une certaine mesure, la combinaison productive qui avait été choisie par le capitalisme français de l'époque, et cela relançait la substitution capital-travail défavorable à l'emploi. Au total, la somme des deux effets secondaires était presque équivalente à l'effet primaire, ce qui permettait de dire que, contrairement à ce que disaient à la fois M. René Monory - qu'il m'excuse, puisqu'il est notre hôte - mais aussi M. Jacques Chirac, que le renvoi des travailleurs immigrés pouvait être la solution au chômage en France; depuis , il est vrai, bien d'autres ont dit cela. Dans le même esprit, le bilan social qui avait été fait à l'époque montrait que les caractéristiques de notre système de protection sociale, la territorialité, le plafonnement des cotisations, et les finalités qui conduisaient à réaliser des tranferts des jeunes aux vieux, des célibataires aux mariés, des bien portants aux malades, situaient les populations étrangères en position défavorable, c'est-à-dire que celles-ci contribuaient relativement plus que la moyenne aux recettes de la protection sociale en dépit de la modicité générale de leurs rémunérations. De même, en ce qui concerne la balance des paiements - on incriminait à l'époque l'effet, pour la balance des paiements, des transferts de fonds des travailleurs immigrés dans leur pays d'origine - on pouvait montrer que l'effet de compétitivité que j'ai évoqué précédemment et la demande extérieure créée et adressée à la France du fait de ces transferts de fonds, compensaient assez largement les transferts primaires qui affectaient dans un premier temps la balance des paiements. Ces modèles, bien entendu, vivent ce que vivent les situations qui les justifient, et je ne défends pas aujourd'hui en l'état celui utilisé alors. Ce que je regrette simplement, c'est que l'on n'ait pas poursuivi ce type de réflexion alliant les catégories et s'efforçant de leur donner sens. On peut penser aujourd'hui qu'à un modèle taylorien, dominant en 1975, s'est superposé un modèle de type tiersmondiste, fondé sur la précarité de la main d'uvre, combiné à des stratégies de délocalisation du capital dans des zones d'état de droit incertain. Le Haut Conseil à l'intégration, de son côté, a poursuivi des travaux que l'on peut rattacher à ce type de problématique, en montrant par exemple, en étudiant l'interface juridico-culturelle des différentes populations, que le dénombrement d'une communauté n'autorise pas à lui affecter une culture homogène. D'abord parce que l'on peut montrer que cette culture s'use au fil du temps et se mélange, féconde et est fécondée elle-même par les cultures avec lesquelles elle entre en contact. En même temps, il y a de la part de la population ainsi dénombrée et présumée homogène, une réinterprétation individuelle des cultures d'origine qui donne finalement un ensemble d'une nature culturelle plus diversifiée qu'il n'y paraît. On peut aussi évoquer les travaux du Haut Conseil sur, non pas le "travail clandestin", nous avons eu un débat au sein du Haut Conseil qui a préféré finalement parler "d'emploi illégal". Le changement de vocabulaire a évidemment un sens, et il est vrai que l'on est généralement plus soucieux de tenter de comptabiliser les travailleurs clandestins que les employeurs en situation illégale, c'est François Maspéro qui, dans le Monde, il y a quelques jours, en faisait la remarque pertinente. Dans ce domaine, il y a aussi des méthodes qui sont simples, mais aussi très intéressantes et hautement significatives. Je pense notamment, à la publication de l'INSEE "Contours et caractères" qui de façon très détaillée et très proche de la vie de tous les jours, rend compte de l'utilisation comparée du frigidaire, de l'automobile, de la télévision, etc. des populations françaises et étrangères. Ces études montrent des différences de comportements susceptibles d'être comprises, analysées et qui traduisent d'une manière générale des convergences au fil du temps. Nous avions également, dans le cadre du Haut Conseil à l'intégration, eu l'idée de constituer des tableaux de bord de l'intégration, en identifiant quatre dimensions qui étaient, autant que je me souvienne, la nationalité, l'insertion dans la société, la famille, la promotion sociale. Nous avions fait éclater ces quatre dimensions en douze critères et les douze critères en vingt-trois indicateurs. Cela permettait d'avoir des données, des taux, des chiffres significatifs montrant comment évoluait la différence entre les groupes-cibles que nous souhaitions examiner. Et puis, il y a eu, enfin et surtout, l'enquête sur la mobilité sociale réalisée par l'INED avec le concours de l'INSEE, et pilotée, comme on le sait, par Michèle Tribalat. Cette enquête qui a concerné des milliers de partenaires, a été un grand moment, à la fois par le débat auquel elle a donné lieu avant même qu'elle commence, et puis ensuite, dans l'exploitation qui en a été faite et qui a permis incontestablement de faire progresser la connaissance du processus d'assimilation ou d'intégration. Qui doit compter? Il y a beaucoup de gens qui comptent dans l'administration: l'INSEE, l'INED - quand je parle de compter, je parle aussi de traiter le chiffre - le ministère de l'Education nationale, de la Justice, de l'intérieur bien évidemment, l'OMI, l'OFPRA, et d'autres encore. Donc beaucoup de gens comptent et chacun a le souci de cultiver la rente dont il est le bénéficiaire, dans la mesure où il contrôle la source; et cela se traduit par un particularisme administratif qui nuit à l'expression scientifique des données, des phénomènes. C'est pourquoi Michel Rocard, Premier Ministre à l'époque, en 1990, en créant le Haut Conseil à l'intégration lui avait donné comme vocation d'assurer une sorte de rationalisation de ces différentes démarches et une coordination de la présentation des données. Je crois qu'il y a eu des progrès faits dans ce domaine, ne serait-ce qu'en adoptant une nomenclature unique des nationalités, en retenant des tableaux-types que l'on a invité les différentes administrations à respecter. Mais lorsqu'il n'y a pas une volonté politique continue, même ces aspects techniques du comptage finissent par déraper. Nous en sommes là aujourd'hui, où l'on revient vers une sorte de balkanisation de l'administration qui compte l'immigration, jusqu'à voir des comportements que je n'avais jamais connus dans ma carrière pourtant déjà longue de fonctionnaire: des administrations passer entre elles des contrats avec financement, plutôt que, sur un sujet pareil, de définir simplement un programme de travail et de l'appliquer de manière méthodique dans les délais initialement prévus. Cela dit, rien n'est désespéré, des solutions sont en gestation et on peut penser que la raison finira par prévaloir. Une autre question se pose à ce sujet: la création éventuelle d'un observatoire de l'immigration. Jusqu'à présent, le Haut Conseil à l'intégration et les administrations qui participent à cette réflexion se sont refusés à aller dans ce sens. D'abord parce que, entre-temps, les autorités administratives indépendantes ont montré qu'elles représentaient un démembrement de l'Etat qui n'était pas toujours efficace, et qui aboutissait à constituer des entités autonomes, parfois arrogantes, au point que certaines d'entre elles en arrivaient à prétendre, sur certains points, réglementer l'Etat lui-même. Il me semble qu'il vaut mieux, sur une question aussi politiquement sensible que celle-là, que l'Etat garde la haute main et impulse une coordination saine et contrôlée du comptage. Pour quelle politique? Pour quelles valeurs? Je voudrais terminer en évoquant les relations du comptage et des finalités, des valeurs, de la politique d'immigration, et ce de trois points de vue. En premier lieu, je crois que l'on est fatalement conduit à établir une liaison entre le comptage, aussi brut soit-il, et l'idée de citoyenneté. C'est-à-dire ses valeurs, les droits et obligations qui lui correspondent et sa dynamique. La citoyenneté nourrit le pacte républicain et le Haut Conseil à l'intégration n'a jamais manqué, dans les rapports qu'il a publiés, de rappeler que l'intégration à la française, si elle était a priori et traditionnellement largement ouverte et si elle avait des références historiques à faire valoir, supposait le respect d'un certain nombre de valeurs, non pas parce qu'il s'agissait de valeurs nationales françaises, mais parce que nous leur conférions une vocation universelle. Je pense au principe d'intérêt général tel que nous le concevons, ou au principe d'égalité, au principe de responsabilité. Mais comme aujourd'hui il y a encore une large superposition entre la citoyenneté et la nationalité, cette question dépendra des évolutions des Etats-nations et notamment de l'Etat-nation français. Il est bien certain que l'on ne comptera pas de la même façon selon que cette catégorie perdure ou qu'elle dégénère. Et des accords comme les accords de Schengen qui, en la forme, peuvent apparaître comme un essai pour repousser les frontières au niveau des frontières de l'ensemble communautaire, n'ont pas acquis cette image pour le moment et ont plutôt acrédité l'idée de la citadelle assiégée plutôt que celle de l'augmentation d'un espace vital de libre circulation. Je crois donc que le comptage sera appelé à évoluer en fonction de ce que les cadres géographiques ainsi évoqués deviendront dans l'avenir. Sans parler bien entendu de cette dimension mondiale de la citoyenneté qui résoudrait tous les problèmes, puisque se trouverait vérifiée l'hypothèse de Kant sur le droit à la mobilité générale et qui pourrait aujourd'hui favoriser la représentation mondiale des flux qui dédramatiserait les perceptions strictement nationales. Deuxième aspect s'agissant des finalités, le comptage et l'appréhension des communautés. C'est un phénomène de pleine actualité et extrêmement délicat, je ne voudrais pas en dire trop, pour ne froisser personne à ce sujet. Le Conseil d'Etat a eu l'occasion de discuter d'un avis demandé par le gouvernement concernant la signature d'une convention-cadre, issue de la Conférence du Conseil de l'Europe à Vienne en 1993. Cette convention reconnaît des droits spécifiques à des minorités qui ne sont pas expressément définies, mais qui sont caractérisées néanmoins par les critères de culture, de langue, de religion et d'ethnie. Sur les trente-trois pays du Conseil de l'Europe, vingt-cinq ont déjà signé. La France ne peut pas le signer en l'état car, sur trois ou quatre points, ce texte est contraire à sa Constitution. Mais quand bien même cette question ne se serait pas posée, je pense personnellement qu'il est souhaitable qu'elle ne signe pas. L'Allemagne a signé cette convention en donnant sa définition de la minorité et en l'assortissant d'une liste des minorités existant en Allemagne. Je ne pense pas qu'il faille s'engager dans cette voie. Aujourd'hui on voit se développer dans la presse, et très récemment encore, une sorte de culte de la différence qui prend une acuité toute particulière en entretenant la confusion sur l'idée du multiculturalisme. Si l'on s'en tient à l'acception simple de la culture, je crois qu'il n'y a pas de problème; mais dans la mesure où l'on met dans la culture, le religieux, le linguistique et l'ethnie alors évidemment, la chose est différente. Et même avec les meilleures intentions, des démarches comme celle de Michel Wieviorka par exemple, dans la mesure où elles théorisent le particularisme, me semblent lourdes de danger en évacuant le général, c'est-à-dire les principes. Et c'est pour cela que je pense qu'il y a là aussi pour le comptage - car on ne comptera pas de la même manière selon que l'on ira dans un sens ou dans l'autre - un redoutable problème. Enfin, dernier point à ce sujet, comment doit-on considérer le modèle français d'intégration au regard de ces évolutions et quelles en sont les conséquences sur la statistique? Si j'évoquais tout à l'heure le chiffre, que je ne crois pas bien fondé, de 40'000 étrangers qui retournent dans leur pays d'origine, 40'000 d'un côté, 100'000 de l'autre qui arrivent, ce sont des ordres de grandeur comparables. Il me semble que nous avons focalisé la réflexion jusqu'à présent sur la politique d'intégration à la française, et accordé finalement peu de soin à cette noria qui pourrait s'entretenir et se développer. Une affaire comme celle des Maliens de Montreuil, assortie des émissions de radio et de télévision qui ont suivi, montrant concrètement quelles sont les finalités de ce type d'immigration, à mon avis: ce n'est pas l'intégration. Nous ne pouvons donc pas leur appliquer le raisonnement général sur le modèle français d'intégration. Faut-il découpler ou non intégration et coopération? Je ne sais pas, mais il me semble que c'est un problème que nous rencontrerons avec une acuité croissante. Et puis enfin nous sommes assez fiers de notre conception et nous campons sur le droit du sol et sur le principe d'égalité, et nous récusons ce qui comporte trop de droit du sang et de droit des minorités. Mais nous sommes impliqués dans un débat sur la construction de l'Europe où la France est, il faut bien le dire, sur ce terrain, assez largement minoritaire. Comme elle l'est sur le service public, comme elle l'est sur la laïcité. Quel sera le résultat de cette confrontation inévitable? Quoi qu'il en soit, le comptage serait affecté par une dénaturation des principes d'intégration. Les notions d'effet de structure et d'effet de processus que j'ai évoquées perdraient alors beaucoup de leur intérêt puisque la société tendrait à être construite par une juxtaposition de communautés. Ce n'est plus l'intégration qui serait alors l'objet de la mesure, mais les facteurs de différenciation et de coexistence de ces communautés. En espérant que cette coexistence soit suffisamment pacifique pour permettre au statisticien de garder sa sérénité. Philippe Bernard: Merci Monsieur Le Pors. Comme Pierre Tournier l'a dit, chacun parle ici en son nom propre mais il n'est pas inutile pour prévenir les questions du genre "d'où l'orateur parle-t-il?", de rappeler que Anicet Le Pors, outre son passé d'ancien ministre, est aujourd'hui conseiller d'Etat, conseiller général des Hauts-de-Seine, et ce soir surtout responsable de la cellule statistique du Haut Conseil à l'intégration. Sur la forme ce débat a été intitulé "si l'immigration m'était comptée"; j'espère pour ma part que l'allusion à l'esprit de Sacha Guitry s'arrêtera là et que la langue de bois et le formalisme ont été laissés au vestiaire. Sur le fond deux ou trois précisions. Le moment où se passe ce débat évoque une actualité chargée sur l'immigration. C'est un hasard puisqu'il est préparé depuis de long mois, bien avant que le nom de Saint-Bernard n'évoque les Africains sans-papiers. Il y avait une actualité beaucoup plus molle au moment où Pénombre a parlé d'organiser cette soirée, mais il se trouve évidemment que l'actualité ne peut que nourrir les débats de ce soir, je pense que ce n'est pas plus mal. L'idée générale, c'est de discuter de l'utilisation des chiffres dans les débats sur l'immigration et plus particulièrement du fossé qui existe entre les catégories statistiques telles qu'elles existent et les réalités perçues par la population, par l'opinion. Pour éclairer ce thème, il a été choisi de faire appel à trois contributions courtes, pour ouvrir le feu en quelque sorte. Après quoi pourront rebondir la quinzaine d'experts présents, et puis on ouvrira plus largement le débat. Les trois heureux élus sont Michèle Tribalat, chargée de recherches à l'INED, coauteur de l'enquête à laquelle il vient d'être fait allusion sur les populations d'origine étrangère en France, sur le thème quelles catégories pour quelle information sur les populations d'origine étrangère, notamment est-ce que la catégorie de nationalité est suffisante pour décrire ces évolutions? Le second intervenant sera Savinien Grignon Dumoulin, magistrat, chef du bureau de la nationalité au ministère de la Justice qui à ce titre est l'observateur le mieux placé pour décrire l'application de la réforme Méhaignerie de 1993 du code de la nationalité et nous parler du décalage entre le débat très fort qu'il y a eu à ce moment là sur la réforme de la nationalité considérée comme capitale pour préserver l'identité française et puis la difficulté aujourd'hui d'avoir des informations sur la réalité de son application et le comportement des jeunes qui sont concernés. Le troisième sera Claude Valentin Marie, responsable des études à la Mission interministérielle pour la lutte contre le travail clandestin, l'emploi non déclaré et les trafics de main-d'uvre. A lui reviendra la mission sans doute difficile, celle de déchiffrer l'indéchiffrable, c'est-à-dire l'illégalité, le séjour illégal, le travail illégal et montrer comment ces chiffres fantômes qui nourrissent tant de fantasmes peuvent malgré tout être approchés. Voilà. La règle du jeu veut que les intervenants parlent depuis la salle et qu'après on rebondisse via la table.
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