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« 222 ? Les bandes. Et 367 ? » Du nombre en burqa

Quelques précisions sur ce titre énigmatique de la Lettre blanche n°51 sur lequel même l’auteur de l’article s’est interrogé. Selon le texte, 367 se référait à l’estimation du nombre de femmes portant la burqa, mise en circulation par la DCRI pendant l’été 2009. Mais pas de lien évident avec 222, sinon pour qui se souvenait alors d’une autre « estimation » du même organisme à propos du nombre de bandes de jeunes et de la communication de la ministre de l’Intérieur, Michèle Alliot-Marie. « Vous avez aujourd’hui en France 222 bandes recensées. Ces 222 bandes sont à 79 % en région parisienne et elles comportent environ 2 500 individus qui sont des permanents de ces bandes, 2 500 autres qui sont des occasionnels, parmi eux vous avez 47 % de mineurs » (Le Monde, 17/03/2009).

Le rapprochement de 222 et 367 (devenu 2 000 depuis) n’était ni géographique, ni mathématique mais relevait plutôt d’une application pratique de la loi de Pescheur (Lettre blanche n°49) reliant la vitesse de circulation des chiffres à leur pouvoir de persuasion. Il illustre au moins deux moments. Un, la presse se précipite sur un chiffre mal sourcé pour en faire un événement. Ce n’est plus le « chiffre du jour » pris un jour donné parmi l’ensemble des chiffres sérieux disponibles (par exemple venant de l’Insee, taux de chômage mis à part). Ce serait plutôt le « chiffre d’un jour ». Car, deux, après l’effet de surprise et l’intérêt pour un fait devenu si réel qu’il est dénombré (des bandes, des porteuses de burqa), vient le doute, la critique sur les blogs (qui en la matière vont plus vite que Pénombre) si bien que les responsables politiques se trouvent contraints à plus de prudence sur le sujet (au moins en matière de chiffres).

Une caractéristique importante, plus cruciale que la fausse précision du chiffre d’un jour facilement raillée, est ce qui fait essentiellement défaut à ces nombres : une définition et une convention de comptage (la méthode). Le cas de la burqa nous a fait sourire à cet égard. Comment le compteur sait-il, en voyant passer une femme portant la burqa, si cette personne n’a pas déjà été comptée ? Comment fait-on pour les porteuses à temps partiel ? Distingue-t-on l’incidence (nombre de nouveaux cas pendant une période) de la prévalence (nombre de femmes qui ont porté la burqa au moins un temps au cours d’une période donnée) ?

On ne sait pas si le (la) compteur(se) portait la burqa, mais il est sûr que 367 était un chiffre entièrement voilé lors de son apparition. Comme le 222, et bien d’autres à venir. Faut-il une loi interdisant les nombres en burqa ?

La rédaction