Aux élections européennes du 13 juin 1999, beaucoup de partis politiques affichaient leur satisfaction.
Notamment l’UDF dont le leader, François Bayrou, affirmait : "avec 9,28% des voix, nous avons obtenu un bien meilleur score que la liste de Simone Veil, qui, dans des conditions analogues, c’est-à-dire soutenue par la seule UDF, n’avait recueilli en 1989 que 8,42% des voix".
Il faudrait d’abord s’interroger sur l’expression "conditions analogues", car entre 1989 et 1999, le paysage politique français en général et l’UDF en particulier ont bien changé. Mais en supposant que les conditions ont bien été analogues, il faut, pour déterminer la progression éventuelle de l’UDF entre ces deux élections, ne pas se référer aux suffrages exprimés, mais à l’ensemble des électeurs inscrits à chacune de ces deux dates.
Or en 1999, les abstentions s’élevaient à 53,24% des inscrits et les votes blancs à 5,92% des votants. Les suffrages exprimés ne représentaient donc que :
(100 - 53,24) x (100 -5,92) / 100 = 46,76 x 94,08 / 100 = 43,99 % des inscrits.
Moins de 45% des électeurs français ont porté un intérêt aux élections européennes en 1999 !
La liste de François Bayrou a donc obtenu en 1999 :
9,28% x 43,99% / 100 = 4,08 % des suffrages des électeurs inscrits.
En 1989, il y avait eu 47,39% de suffrages exprimés par rapport aux inscrits. La liste de Simone Veil avait donc obtenu en 1989 :
8,42% x 47,39% / 100 = 3,99 % des suffrages des électeurs inscrits
Quand on passe de 3,99% à 4,08% des "inscrits", on ne peut plus parler de bien meilleur score, mais plutôt de "quasi-stagnation".
Ce raisonnement vaut aussi pour d’autres partis, dont le parti socialiste, qui, prudent, s’est bien gardé de tout triomphalisme lors des dernières élections, bien qu’il soit passé entre 1994 (liste Rocard) et 1999 (liste Hollande) de 14,49% à 21,95% des suffrages exprimés. Par rapport aux inscrits, ces pourcentages respectifs s’élèvent en effet à 7,56% en 1994 où il y avait eu 44,9% d’abstentions et 5,3% de votes blancs et à 9,66% en 1999, soit une progression de seulement 2,1%. Encore faut-il, pour relativiser encore plus cette progression, se rappeler qu’existait en 1994 une liste "radical de gauche" séparée de la liste socialiste - ce qui n’était pas le cas en 1999 - conduite par Bernard Tapie, qui avait raflé plus de 12% des suffrages exprimés.
Alain Marret
Pénombre, Octobre 1999