On y voit enfin un peu plus clair dans les statistiques sur les violences faites aux femmes. On avait appris en 2005 de la ministre de la Parité qu’une femme mourait tous les 4 jours des violences de son conjoint. Pénombre vous avait cependant expliqué pourquoi ce chiffre était probablement sous-estimé du fait du mode de collecte des données. Au début de l’année 2006, l’Observatoire national de la délinquance évaluait d’ailleurs ce chiffre macabre à une femme tous les deux jours, mais voici que madame Vautrin (la ministre susmentionnée) récidive avec son dernier rapport : une femme meurt tous les trois jours, d’après le recensement des 9 premiers mois de l’année 2006. Choquée par ses propres chiffres, elle ajoute même cette analyse (Le Monde du 22/11/06) : « les victimes(…) ont peur de parler. » ! Autre risque de sous-estimation ?
Ce qui est intéressant dans ce chiffre, c’est que la ministre l’utilise comme un indicateur des relations conjugales (au sens large), exactement comme le nombre de tués sur les routes est l’indicateur jugé pertinent pour évaluer la politique de sécurité routière. Parce que cette dernière a montré un succès important, la politique de sécurité conjugale sera du même tonneau : augmentation de la probabilité de la sanction (par une incitation des victimes à dénoncer leur bourreau), aggravation des sanctions (extension de l’aggravation des peines aux ex-conjoints et pacsés), tout cela accompagné d’une communication importante pour dissuader les violences conjugales. À quand le mariage à points ou les détecteurs d’agressivité dans le salon ? Autre similitude : toute politique devant avoir sa justification financière, le ministère des Transports évalue chaque année le coût des accidents (12 milliards en 2005). Eh bien le ministère de la Parité n’échappe pas à la règle, qui a confié au CRESGE (labo de la très sainte université catholique de Lille) une évaluation du coût économique des violences conjugales. Ce travail de bénédictin, sommairement décrit sur parite.gouv.fr, stigmatise plusieurs sources de dépenses pour la société : les naissances de bas à très bas poids [sic], la consommation de psychotropes et les hospitalisations. On trouve aussi le coût des divorces, celui du travail de la police, des salaires non perçus par les maris violents emprisonnés, de la fabuleuse « perte de production domestique », ainsi qu’un coût de la douleur et de la « perte de bien-être ».
On ne sait pas vraiment combien de femmes souffrent, mais on sait maintenant combien elles ont coûté en 2004 : « environ un milliard d’euros » selon la ministre, un milliard quatre-vingt-quatorze millions cinq cent mille euros selon les chiffres affichés, soit un Rafale entièrement équipé tous les 18 jours !
Fabrice Leturcq