« Les sondages, c’est pour que les gens sachent ce qu’ils pensent. »
Coluche
La grève à la SNCF, qui dure alors depuis près de deux mois, n’est pas justifiée pour 58 % des personnes interrogées, selon un sondage Ifop paru le 27 mai 2018 dans Le Journal du Dimanche.
Ce chiffre est quasi identique à celui du sondage réalisé au début du mouvement : deux jours après le démarrage de la grève 56 % des sondés ne trouvaient pas le mouvement justifié, contre 44 % d’un avis opposé, selon une étude réalisée les 5 et 6 avril.
De la mi-mars à la mi-mai, l’Ifop a produit onze enquêtes dont les résultats fluctuent mollement entre un seuil bas de 53 % et un seuil haut de 59 % de personnes qui considèreraient que le mouvement n’est pas justifié. Avec une « marge d’erreur » de 3 % (pour un échantillon d’un millier de personnes) les variations sont ininterprétables. Pourtant, France Info, comparant le résultat (58 %) d’un sondage Odoxa du 24 mai à celui (54 %) de l’enquête Ifop du 3-4 avril concluait gaillardement à un « chiffre en hausse », tout comme Tourmag (le 1er média des pros du tourisme) et quelques autres.
Mieux, les résultats ne s’écartent guère de celui publié par Odoxa-Dentsu Consulting le 1er mars, donc avant la grève, avec 58 % des Français estimant « injustifiée » la mobilisation envisagée par les syndicats de la SNCF contre le projet de réforme du gouvernement.
C’est la pire situation pour un sondeur comme pour un média, que rien ne bouge ou presque. Peut-on faire un scoop quand on n’a rien à se mettre sous la dent ? Et surtout quand un autre sondage publié le 25 avril, de BVA cette fois, nous informait que 3 Français sur 4 estiment que la grève perlée dans le ferroviaire n’a pas de conséquence sur leur vie personnelle et même que pour 4 % d’entre eux elle a des conséquences positives (non précisées) !
Donc, on mesure un truc qui ne bouge pas et dont la grande majorité des sondés se tape. Et ce n’est pas tout à fait nouveau, il y a quatre ans, en juin 2014, un sondage d’Harris interactive donnait 76 % de Français opposés au mouvement de grève annoncé par les cheminots qui réclamaient déjà un report de la réforme ferroviaire, mouvement qui se soldait par une douzaine de journées de perturbations du trafic.
Mais un doute subsiste : un autre institut, Elabe, indiquait ce 23 mai que « les opinions sont stables depuis un mois à l’égard de la mobilisation des agents SNCF : 48 % (stable depuis le 25 avril) des Français y seraient défavorables, dont 23 % (-1) opposés et 25 % (+1) hostiles. À l’inverse, 36 % (-1) des Français seraient favorables à ces mobilisations, dont 19 % (-1) affirment les soutenir et 17 % (stable) éprouvent de la sympathie. 16 % (+1) déclarent être indifférents face à ces événements. »
Conclusion : près de la moitié des Français se déclarent défavorables à la grève des cheminotes-cheminots, mais 6 sur 10 estiment le mouvement injustifié. Autrement dit, on compterait 10 % de Français pervers ou perfides. À moins que la façon de rédiger les questions n’induise un certain biais.
Daniel Cote-Colisson