Le 23 mars dernier, sur France Inter, l’émission de Jean-Pierre Coffe : « Ça se bouffe pas, ça se mange » était consacrée à l’œuf.
On y apprenait que les poules pouvaient être élevées suivant différentes modalités et on comprenait que le consommateur avait bien du mal à s’y retrouver dans les différentes appellations : « œufs frais », « fermiers », « gros œufs », « provenant de poules élevées au sol », « en plein air », « en libre parcours » ; seules les trois dernières catégories font réellement référence aux conditions d’élevage des poules : industriel en bâtiment (avec ou sans parcours extérieur) pour la mention « au sol », à l’extérieur avec abri pour « plein air » (en application à partir de 2003 de la directive européenne 1999/74/CE sur le « bien-être des poules pondeuses », les poules jouissant pendant la journée d’une possibilité ininterrompue de libre parcours en plein air et la densité animale ne devant, à aucun moment, dépasser 2 500 poules par hectare de surface utilisable, soit au minimum 4 m2 par poule), ou en « libre parcours » (parcours d’au moins 10 m2 par poule). Enfin, cas particulier, les labels rouges correspondent à un élevage au sol avec « parcours herbeux ou de sous-bois » de 5 m_ pour chaque poule…
Plusieurs grands producteurs participaient à l’émission et l’un d’entre eux a voulu justifier l’élevage en batteries par le fait qu’on élève en France quelque 60 millions de poules pondeuses qui, si elles devaient disposer chacune de 4 m2, occuperaient la moitié du territoire métropolitain(1) (sic).
Même à Saint Trop’ en été, chaque Français (et même chaque étranger) dispose de plus de 4 m2 pour étendre sa serviette ! Mais, comme le disait mon professeur : « quand la mathématique a tort, c’est que tu t’es gouré ». En effet, 60 millions de fois 4 m2 font 240 millions de m2, donc je divise « naturellement » par 1 000 pour passer au km2 et j’aboutis à l’énormité ci-dessus !
Le plus intéressant, c’est que Coffe, qui d’ordinaire se montre pointilleux sur le moindre additif est apparu peu critique sur le multiplicatif.
Daniel Cote-Colisson
(1) 550 000 km2, comme chacun sait.
Pénombre, Juillet 2003