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« C’est comment qu’on freine »

Dans la première page de son édition du 11 février 2019, le Parisien lance un débat sur les seniors au volant, « relancé par le témoignage de Pauline, amputée après avoir été renversée par un chauffard de 92 ans, et la pétition de son père appelant à contrôler les capacités des conducteurs âgés ». La pétition recueillait fin octobre 2019 les signatures de plus de 100 000 personnes.

L’argumentation commence avec l’évocation de plusieurs accidents de la circulation imputables à des personnes âgées : 82 ans à Gallargues, 92 ans à Buchelay, 81 ans à Tours ; il y a même un encart consacré au prince Philip, qui a 97 ans. La cause semble entendue mais, curieusement, le paragraphe suivant s’intitule « Moins d’accidents mortels que le reste de la population » et nous invite à considérer l’infographie ci-contre qui doit prouver cette affirmation.

On s’étonne d’abord de voir que l’on parle maintenant des plus de 65 ans alors qu’auparavant, les exemples choisis dépassaient les 80 ans... Ensuite, on peut se demander en quoi le fait d’apprendre que les plus de 65 ans sont responsables de 16,9% des accidents mortels en 2017 nous convainc que « les personnes âgées ne sont pas plus dangereuses que les autres ». Surtout qu’une présentation en tore ne fait rien d’autre que d’empêcher une claire comparaison entre des tranches d’âge de valeur inégales...

On aurait pu au moins comparer cette proportion avec la part des plus de 65 ans dans la population. Mieux, on aurait pu tenir compte de la part des plus de 65 ans dans la population des conducteurs. Plus difficile encore, on aurait pu introduire le nombre de kilomètre parcourus, et les conditions de leur conduite, pour prendre en compte ce que signale Anne Lavaud de la Prévention routière, à savoir que les plus âgés « adaptent leur conduite, en roulant moins, en arrêtant de conduire la nuit »...

Le comble est atteint avec la partie gauche de l’infographie, qui fonde ce commentaire : « Mais ils sont tout de même 852, de plus de 65 ans, à avoir perdu la vie sur la route en 2018. » Ils étaient coupables de causer des accidents mortels, ils sont maintenant coupables de mourir...

Jean-Jacques Petit