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Commentaire d’un Pénombrien

Les exemples abondent de bizarreries qui suggèrent une erreur qui n’en est pas une. Sans doute, lorsque la mathématique a tort, c’est qu’on s’est trompé. Pour autant, ne pouvoir expliquer un phénomène ne signifie pas qu’il y a un problème de mathématique.

Exemple 1 :
« 30 % des hommes mariés affirment avoir eu une aventure avec une femme mariée alors que seulement une femme mariée sur dix aurait eu une aventure avec un homme marié » :
 - problème de mathématique ?
 - vantardise des uns, discrétion des autres ?
 - taille respective des populations d’hommes mariés et de femmes mariées ?
 - comportements différents : à population comparable, il suffirait que les femmes mariées qui ont une aventure avec un homme marié changent 3 fois plus souvent de partenaire…

Exemple 2 :
J’ai le choix entre deux bus pour me rendre au travail, le 162 et le 187, l’un et l’autre passant toutes les 10 minutes ; je n’ai pas d’horaire précis et décide de prendre le premier qui passe. Au bout d’un an, j’ai pris180 fois le 162 et seulement 20 fois le 187 :
 - problème de mathématique ?
 - et si le 187 suit d’une minute le 162 ?

Exemple 3 :
La consommation de glace aux halles de Rungis est destinée à 99 % aux grossistes en poissons ; la corrélation des tonnages journaliers vendus avec les tonnages de poissons commercialisés ces mêmes jours est à peine significative ; de même pour la corrélation avec les courbes de température :
 - problème de mathématique ?
 - ou problème mal posé ? (en réalité la corrélation entre le ratio journalier des tonnages glace/poisson et la température est très élevée : c’est, toutes choses égales par ailleurs, lorsque la température augmente que la demande de glace augmente, mais les volumes de poisson commercialisés sont très importants en hiver et ne nécessitent pas alors un grand volume de glace).

L’expérience des sondages dans le cadre des études sociologiques ou des études de marché me suggère plutôt que le problème a été mal posé ou incomplètement analysé. Dans le cas qui nous occupe, je formulerais volontiers quelques hypothèses :
 - celui qui a un ego surdimensionné et affirme être un très bon conducteur ne peut imaginer que les autres puissent être également très bons conducteurs, sauf quelques exceptions ;
 - celui qui, avec humilité, dit qu’il conduit plutôt mal reconnaît sans doute que les autres sont nombreux à conduire mieux que lui, voire beaucoup mieux ;
 - etc.

Et dans ce cas, le minimum est de croiser les deux séries d’informations, avec un tableau de type :

Estime être ?

Très
bon

Assez
bon

Assez
moyen

Très
moyen

NSP

Estime que
les autres
sont ?

         

Très bon

         

Assez bon

         

Assez moyen

         

Très moyen

         

NSP

         

Alors seulement (et l’exercice n’est pas limitatif) pourra-t-on supposer un éventuel problème de cohérence des réponses.

Daniel Cote-Colisson

 


Pénombre, Juillet 2006