--

Finalement, qui paie quoi ?

J.-R. B. : Alors, réactions ?... D’abord de nos amis journalistes, sur cette manière de voir les choses... Vous avez remarqué le choix des titres : le Canard enchaîné on ne le voit pas, La Croix non plus... bon on a été poli, en somme. C’est vraiment que vos collègues sont nuls ?

L.-M. Horeau : Il faudrait que vous disiez des choses un peu désagréables sur les gens qui sont ici... Qu’on puisse réagir. Là c’est trop facile.

J.-R. B. : Je précise que c’est le hasard des choses qui a fait le choix des exemples.

F. Dixmier : Je n’avais pas prévu les invités... j’aurais pu essayer, j’aurais pu chercher effectivement. Mais vous, vous ne dites jamais de bêtises...

L.-M. H. : Mais si, bien sûr… bien sûr qu’on en dit... Juste une petite réaction sur la première partie des explications, sur le financement des partis politiques : si j’ai bien compris, vous trouvez que ce n’est pas assez clair, pas assez net et que ce n’est pas encore ce qu’il faudrait. J’en suis tout à fait d’accord. Mais enfin, permettez-moi aussi d’avoir une certaine nostalgie de l’époque où il n’y avait aucune règle d’aucune sorte, où on vivait uniquement sur les commissions, sur les fonds secrets et autres enveloppes, ce qui, quand même, pour le Canard était un temps béni, puisque c’était le temps de la pénombre. Je regrette un peu ce temps-là... (rires)

J.-R. B. : Première expression de nostalgie... est-ce qu’il y en a d’autres ?

F. Lehobey : Ce n’est pas vraiment de la nostalgie, parce que c’est la nostalgie d’un temps qui n’a certainement jamais existé. Ce que je voudrais dire va parler d’argent, de parité, et se termine sur une proposition. L’histoire, c’est qu’en fait le Parti socialiste a été condamné à perdre de l’argent, enfin c’est une façon de voir, à cause des femmes qu’il n’a pas fait élire… C’est dommage qu’on n’ait pas eu les chiffres pour lui, parce que le chiffre que j’ai, je le tiens de seconde main, ce serait 10 millions de francs... Je regrette une époque qui n’a jamais existé, celle où les partis politiques tiraient leur financement des cotisations de leurs membres et de leurs élus. En fait ça n’a jamais marché comme ça, malheureusement, mais vous allez voir le lien avec ce que je vais dire par la suite : il y a eu cet été, je ne sais plus dans quel endroit exact, une université d’été des femmes élues politiques, et c’est là où arrive la proposition : ce que les participantes de cette université d’été ont remarqué c’est que, puisque le Parti socialiste avait délibérément renoncé à 10 millions de francs, il n’avait pas à le faire supporter à ses propres adhérents. Et elles ont suggéré, en faisant une proposition un peu méchante et brutale, que les militants du Parti socialiste retirent chacun 15 euros à leur cotisation. C’est une façon de faire payer deux fois le non-respect de la parité, qui a non seulement un coût politique, puisque le Parti socialiste avait lui-même voté la loi, mais aussi un coût financier. C’est une mesure que les propres membres d’un parti peuvent appliquer eux-mêmes pour faire ce que la loi ne fait pas assez.

J.-R. B. : J’avais un peu de crainte en t’écoutant, parce que je croyais que tu allais dire qu’il fallait faire payer plus cher les adhérents masculins que les adhérentes ! Puisqu’ils ont plus de chances d’être promus par leur parti, ce serait au fond assez normal... S’il y a des membres du Parti socialiste dans l’assistance, ils peuvent éventuellement proposer ça à leur parti et y réfléchir. Ça vaut aussi pour d’autres partis, d’ailleurs. Y a-t-il d’autres propositions constructives comme celle qu’on vient d’avoir ?

La salle : Où va l’argent des pénalités ?

J.-R. B. : Où va l’argent des pénalités ? Est-il redistribué ou retourne-t-il au Trésor Public ?

N. Meunier : Je ne sais pas exactement sur la parité…

J.-R. B. : Où va l’argent des femmes ?

N. M. : L’argent des femmes, je ne sais pas, mais je peux vous faire une réponse sur l’argent de l’argent. La cagnotte dont je vous ai parlé, en fait, est définie au départ. Mais chaque année, les partis doivent présenter leurs comptes pour bénéficier de ce financement. Ce n’est pas leur seule source de financement, mais c’est effectivement plus clair qu’avant. Ce qui se passe, c’est que chaque année ce n’est pas le même montant qui est versé parce qu’il peut y avoir un parti comme « Nancy pour tous », pour rester dans la zone, qui ne va pas présenter à temps ses comptes clôturés, et donc ne va pas bénéficier de ses 21 F. Et ça, c’est de l’argent qui n’est pas distribué : donc c’est tout bénéfice pour le Trésor Public. Sans doute que pour la parité, c’est la même chose...



 
C. Baudino : En tout cas, la perte du Parti socialiste, ce n’est certainement pas 10 millions, parce que la perte de l’UMP, c’est quatre. J’ai les chiffres de l’Observatoire de la parité, je peux rechercher si ça vous intéresse, mais la perte de l’UMP c’est 4…

La salle : 4 en euros, et 10 en francs…

C. B. : Ah ! oui, en francs... OK.

F. D. : Non, même pas, ça ne va pas.

J.-R. B. : Justement, ça va dans l’autre sens, donc si on raisonne en euros…4 millions d’euros… le Parti socialiste c’est sans doute plus que l’UMP parce que c’est plus gros…

La salle : Non…

J.-R. B. : … Ah ! c’est moins ? Oui mais il faut multiplier par le total de financement : en pourcentage, c’est moins, mais... Je n’ai pas tout suivi... (rires)

La salle : Le P.S. a perdu les élections…

F. D. : On avait oublié ce détail…

C. B. : Voilà, je l’ai, j’ai la pénalité... le montant de la pénalité sur la première portion en euros pour le Parti socialiste, c’est 1 323 722,30 euros.

J.-R. B. : Ça fait bien 10 millions de francs, c’est cohérent à quelques pouièmes… Excusez-moi, je faiblis à cette heure tardive, avec autant de calculs...

F. L. : Une question sur le financement : la discussion de ce soir m’a appris qu’une rumeur qui a circulé entre les deux tours était infondée, si j’ai bien compris les explications qui nous ont été données. Entre les deux tours de l’élection présidentielle, qui à première vue ne concerne pas le financement des partis politiques, il y a un courrier électronique qui a circulé… mais vous savez ce qu’il faut accorder comme crédit au courrier électronique… Le message disait que l’abstention apportait de l’argent à Le Pen, parce que justement, comme l’enveloppe globale était fixe, le fait de s’abstenir faisait qu’il y avait une plus petite division de cette enveloppe. Le calcul était assez compliqué, mais, s’il était pertinent, c’était très plausible… Seulement, apparemment, ce n’était pas vrai pour l’élection présidentielle.

N. M. : Non, c’est calculé sur le premier tour des législatives.

J.-R. B. : Alors c’est vrai ou ce n’est pas vrai ? Il s’agit des législatives ou de la présidentielle ?

F. L. : Ça s’est passé entre les deux tours de la présidentielle, ce que je viens de dire.

F. D. : C’est ça qui est étrange, dans ce qu’il dit...

N. M. : A priori, les 24 millions de voix, c’est le premier tour des législatives. On ne compte en fait que le premier tour de l’élection législative. C’est comme ça que sont répartis les fonds. Mais comme c’était avant, c’était vrai pour après... (rires)

J.-R. B. : Compte tenu de tous ces calculs, le citoyen qui vote bêtement pour le candidat qui lui plaît le plus montre qu’il n’a rien compris. Ça devient horriblement compliqué de voter. Et moi, finalement, je crois que la démocratie participative c’est bien mieux que la démocratie représentative... (rires)
 

 

 
Pénombre, spécial 10ans, Mars 2003