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Jeunes hommes battus, femmes d’âge mur mécontentes, même combat ?

F. Vansteenkiste : Moi j’espère que ces débats ne transpireront pas trop à l’extérieur. Parce que si je suis le raisonnement de Claudie Baudino sur la parité, et hélas, je crois qu’elle n’a pas été la seule à le faire, il est bien clair que, somme toute, le non-respect de la parité n’a vraiment pas coûté cher. Et on ne voit pas pourquoi, aux prochaines élections, on se priverait de représenter 85 % d’hommes, parce que vraiment, au prix que ça coûte, ça ne vaut pas la peine de s’en priver.

J.-R. B. : Ce que je trouve étonnant, c’est que dans toute notre conversation, le postulat selon lequel un homme se vend mieux sur le marché électoral qu’une femme n’a été contesté par personne. Toute notre conversation de ce soir avait ce postulat au départ. Vous en tirez les conclusions que vous voulez…

N. M. : Si je comprends bien, la parité, ça joue dans les deux sens, c’est-à-dire qu’un parti qui présenterait 85 % de femmes serait lui aussi lourdement pénalisé. (rires)

J.-R. B. : Ça peut éventuellement arriver dans le cas de « Metz pour tous »... (rires)

N. M. : 85 % sur un candidat...

F. V. : Je ne peux pas laisser passer ce que vous venez de dire concernant le postulat de départ. Le postulat de départ, je ne sais pas s’il est clair de cette façon pour tout le monde, mais pour moi il l’est de la façon suivante : ce ne sont pas les électeurs qui disent ça, mais les hommes qui se présentent et qui préfèrent avoir la place eux, et le bon fauteuil eux, que quelqu’un d’autre. En fait le quelqu’un d’autre je ne sais pas si c’est pour eux très important que ce soit une femme ou un raton-laveur, mais ce qu’ils veulent, c’est se persuader eux, et persuader les autres qu’ils ont plus de chances d’être élu. Je ne suis pas du tout sûre que ce soit la même situation pour les électeurs. La situation c’est : quand j’ai un siège, je m’y installe, et quand je n’ai pas le siège, je préfère qu’il y ait le moins possible de concurrents autour de moi pour essayer de le prendre ; et si on élimine déjà la moitié de la population, ça aide...

N. M. : Il y a un autre débat qui a un petit peu démarré ces derniers temps : les jeunes hommes râlent parce que les vieux hommes restent, et parce que quand on libère des places, on met des femmes jeunes (rires). Mais c’est vrai, il y a des jeunes lancés dans la politique qui disent « au secours, qu’est-ce qu’on fait, nous ? »

C. B. : Si je peux ajouter juste quelque chose sur les femmes, c’est vrai qu’au moment des municipales, il y a eu aussi un regard critique sur les candidates : on a trouvé que les candidates étaient trop jeunes. Les femmes qui étaient dans les partis politiques ont dit : les hommes utilisent la loi sur la parité ; ils sont obligés de la respecter, mais qu’est-ce qu’ils font ? Ils ne désignent pas aux postes des femmes qui ont de l’expérience, ils désignent de petites jeunes, comme la fameuse Roxane Decorte qui est apparue dans le sillage de Seguin. Donc effectivement, les hommes jeunes ne sont pas contents, mais les femmes d’âge mûr non plus ne sont pas contentes parce qu’on les a laissées au profit de jeunettes…

F. D. : Nicolas a dit « les hommes vieux », mais toi tu as dit « les femmes d’âge mûr »...

F. L. : Je voudrais revenir sur le postulat de départ... En fait je crois qu’il a été assez clair au cours de la campagne, et ça a été redit ce soir, qu’il valait mieux un homme élu qu’une femme battue… (rires)

J.-R. B. : Il y a des associations contre les femmes battues... (rires)… ne te laisse pas troubler, continue... on avait traduit…

C. B. : J’avais fait attention à ne pas utiliser ce terme, et c’est pour ça que je parlais de « candidates ».

F. L. : En fait, le postulat n’était pas exactement celui-là. Ce n’était pas tellement sexué. Le principe était plutôt « il vaut mieux avoir un sortant élu qu’un petit jeune battu. » Et ça je l’ai lu au moins dans Le Monde et le Canard enchaîné, c’était explicite y compris au mois de juin pendant les élections, ce n’est pas quelque chose qui a été analysé a posteriori.

J.-R. B. : On voit qu’il y a encore tout un champ d’exploration sur ce sujet. Est-ce qu’il y a d’autres réactions là-dessus ?… Non ? Alors on se donne enfin l’autorisation de parler des sondages...
 

 
Pénombre, spécial 10ans, Mars 2003