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IAL m’a tuer

Voici un sujet qui, à mon avis, mériterait l’attention des pénombriens : la cartographie de l’accidentologie routière. L’Express a publié dans son numéro 2987 du 2 octobre (page 82) la carte suivante  :

 

Les 96 départements français y sont ordonnés en 6 classes de même effectif :

1er à 16e : 10 à 36 tués pour 100 000 habitants,

17e à 32e : 37 à 45 tués ; 33e à 48e : 46 à 52 tués ;

49e à 64e : 53 à 61 tués ; 65e à 80e : 61 à 69 tués ;

81e à 96e : 70 à 89 tués pour 100 000 habitants.

Moyenne : 43 tués par départements.

C’est moi qui ai recalculé les limites de classes. La carte me semble difficilement interprétable, si ce n’est qu’il y a moins d’accidents dans les départements fortement urbanisés. Voici mes interrogations :

- pourquoi ne retenir que son classement pour colorer un département ? Pour faire des classes de même effectif ? Quel intérêt ?

- le nombre de tués par km parcouru dans le département n’aurait-il pas été plus pertinent ? Mais ce chiffre est peut-être plus difficile à obtenir ? Avec le critère retenu, les départements à fort transit sont « pénalisés » surtout si l’infrastructure autoroutière est faible (les Landes, par exemple) ;

- à quoi peuvent servir ces cartes ? Inciter les préfets des départements les plus « dangereux » à accroître le nombre de contrôle ?

- les taux des départements à faible population devraient être plus fluctuants ? Est-ce vrai ?

La carte de L’Express est issue de données de l’Observatoire national de la sécurité routière (ONISR). Je n’y ai pas trouvé les données ou la carte d’origine, mais j’ai peut-être mal cherché !

Gérard Grancher

Jean-René Brunetière a proposé à la rédaction ce début de réponse : Ces chiffres ne valent pas un clou pour toutes les raisons dites et aussi parce qu’on ne compte que la population permanente, je suppose, sans compter le transit ni le tourisme. Le ministère édite des nombres de tués par km parcouru, dont il fait l’« indice d’accidentologie routière » ou IAL, mais sa fabrication était pourrie il y a encore peu de temps. Ci-joint deux notes que j’avais faites sur le sujet il y a 4 ans. Si quelqu’un a la patience d’entrer dans la cuisine statistique... Je tiens à votre disposition les tableaux de chiffres correspondants (gros tableaux Excel). Je pense qu’une bonne partie des défauts évoqués ont été corrigés depuis 2004.

J.-R.B.

De l’une de ces deux notes, un extrait :

« Pour tout usage grand public, le nombre des tués dans l’année comparé au nombre (éventuellement moyenné) des années précédentes n’est pas le seul chiffre qui ait une signification véritable (quitte à développer un peu de pédagogie sur la significativité des petites variations) ; une analyse statistique sommaire développée dans une note séparée montre que les données actuelles sur les distances parcourues, telles que l’ONISR nous les a transmises, comportent un nombre important d’erreurs ou d’incertitudes (ce qui est assurément excusable, quand on imagine la difficulté de leur collecte), dont l’impact négatif dépasse dans certains cas le bénéfice qu’il peut y avoir à corriger les chiffres de tués en prenant en compte les évolutions de trafic d’une année sur l’autre. Pour l’appréciation de l’effort de sécurité routière à moyen terme dans un département ou une région donnée, le trend d’évolution sur cinq ans évoqué ci-dessus ne serait pas le moins mauvais des indicateurs ; malheureusement, la différence avec le trend national est inférieure aux variations aléatoires, même dans les départements « lourds » : il est à craindre que toute tentative de « palmarès des départements » dans ce domaine soit définitivement illusoire. »