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Editorial

J’ai tout donné au soleil

Tout sauf mon ombre

Guillaume Apollinaire, Alcools

QUE PEUT CONTENIR UN 51 ? Après la lettre carrée 72, puis la lettre ronde 50, pouvions nous produire quelque chose de buvable ? Ni ronde ni carrée, cette lettre a failli être jaune… Pure contingence, plusieurs pages concernent la consommation d’alcool. Mais nous n’oublions jamais que l’abus de chiffres est dangereux pour la santé… L’observation quotidienne des médias apporte un lot d’ingrédients riches et variés qui font le quotidien de nos échanges collectifs. Mais le passage de réactions échangées par courriel au sein du conseil ou sur un forum auquel les adhérents de Pénombre commencent à participer, à une lettre imprimée relève d’une longue alchimie. Que contient donc le 51 ? Outre un échantillon non représentatif de ces réactions glanées depuis des mois, il porte la marque des sujets persistants de notre réflexion collective. Les chiffres et controverses autour de l’action des ministres ne perdent pas de leur actualité. La ronde des portefeuilles ne renouvelle pas franchement le genre (sauf peut-être du côté des gardes des Sceaux ?) Depuis le numéro 47, la Lettre blanche évoquait la préparation d’une future nocturne sur les sondages. Depuis le 5 juin, nous en parlons au passé et vous en trouverez de premiers extraits, en attendant un compte rendu plus complet. Ce site de Pénombre propose déjà le document réalisé en vue de cette soirée. D’autres textes abordent l’usage des nombres sous un angle plus technique. Ainsi les indicateurs diffusés (sinon vraiment utilisés) pour classer les grandes entreprises selon leurs résultats soulèvent une question de principe quant aux pourcentages de variation calculés à partir de valeurs positives ou négatives… L’exemple présenté pourrait ouvrir une discussion qui ne concerne pas que les forts en math. Ce dialogue est déjà nourri à la rubrique « Des ratios et des hommes » avec des critiques et un échange d’arguments autour de la validité des indicateurs statistiques. La raison d’être de Pénombre « le chiffre dans le débat public » nous impose de « tenir les deux bouts ». La technique importe (ici le choix d’un dénominateur pour calculer l’indicateur) mais parce qu’elle engage des enjeux politiques et démocratiques. Un chiffre sans débat est une plume sans chapeau, un débat sans chiffre est un baiser sans moustache… La montée des indicateurs en tout genre, pauvreté, inégalités, richesses, développement humain et maintenant même indicateur du bonheur, nous saisit de vertige non pas tant par elle-même que par les enjeux qu’elle porte, et dont il faut débattre. Alors nous avons décidé d’en faire le thème porteur de notre prochaine assemblée générale en octobre et d’en reparler dans les lettres à venir. En espérant bien sûr que la pandémie de sottises chiffrées à propos de H1N1 nous en laisse le temps.